Hélène Le Touzey, «mère courage» des prisons indonésiennes

Hélène Le Touzey, «mère courage» des prisons indonésiennes

Quand son fils Michaël Blanc a été condamné en Indonésie, ...
© 2013 AFP

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Quand son fils Michaël Blanc a été condamné en Indonésie, Hélène Le Touzey a quitté son emploi, sa famille et sa Savoie natale pour être à ses côtés. Douze ans plus tard, la «mère courage» s'est muée en madone des prisons, étendant son combat à tous les détenus en détresse.



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Ses épaules menues plient sous les lourds cabas recyclables Carrefour: des plats préparés de poulet aux courgettes, des produits de toilette, des revues... Dans la fournaise de Jakarta, Hélène saute dans un bajaï déglingué (trois-roues motorisé), puis grimpe dans un bus antique crachant une épaisse fumée noire, avant de finir sa route sur un «ojek» poussif (moto-taxi).

Après environ deux heures à travers des bouchons dantesques, elle arrive à la prison de son fils, la peau pâle perlée de gouttes de sueur. Mais pour la mère dévouée, le sourire de Michaël vaut tous les efforts.

«Ici, c'est toujours du riz, des légumes bouillis, et de temps en temps un oeuf ou un poisson», explique à l'AFP Michaël Blanc, dans un hall de la prison de Cipinang, dans l'est de Jakarta.

Depuis plus de douze ans, au moins trois fois par semaine, Hélène Le Touzey apporte à son fils petits colis et grands réconforts.

«Sans elle, je serais tombé dans la déchéance morale», admet Michaël. «Sans elle, j'aurais eu la peine de mort».

Le lendemain de Noël 1999, Michaël Blanc est arrêté à l'aéroport de Bali avec 3,8 kilos de haschich dans deux bouteilles de plongée. Elles appartenaient à un ami qui les lui avait confiées pour les transporter, se défend Michaël. Mais la mort est requise.

«J'ai tout posé et j'y suis allé», se souvient Hélène, laissant derrière elle son ex-mari et ses deux autres enfants. Hélène mobilise les médias français, qui s'émeuvent du combat de cette secrétaire-comptable sans le sou contre la toute-puissante bureaucratie indonésienne.

Michaël échappe au peloton d'exécution. Condamné à la perpétuité le 16 novembre 2000, sa peine est commuée en décembre 2008 à vingt ans de prison.

Pour aider Michaël à survivre dans des cellules minuscules et bondées, où il faut payer jusqu'à l'eau potable, Hélène décide de rester.

Et, à force de visites, elle découvre que d'autres ont besoin d'aide. «Les étrangers ici n'ont personne et ils ne parlent pas la langue».

«Je fais leurs courses, je les accompagne à l'hôpital pour traduire ce que disent les médecins. Je fais des bricoles», assure-t-elle, modeste.

Mais elle est également l'avocate des causes perdues, aidant par exemple ce Yougoslave qui n'a plus de pays et que personne ne veut accueillir, ou ces Africains qui sont depuis 14 ans détenus à l'immigration car ils n'ont pas de papier.

Pour eux, elle court d'administrations en ministères, dans les transports en commun indonésiens très rudimentaires. «Le taxi, c'est trop cher», dit-elle. Pour tout revenu, Hélène ne peut compter que sur les dons.

Dans sa très modeste maison du sud de Jakarta, où aucune climatisation ne vient chasser la touffeur équatoriale, il n'y a ainsi pas de douche mais deux réfrigérateurs, débordant de victuailles pour les détenus. Dans une bibliothèque usée, on note la présence de «Papillon libéré», le livre racontant la vie du célèbre bagnard français.

«Il ne lui manque plus que l'auréole», estime Josh Bensen, un ancien détenu néerlandais. «Elle m'apportait parfois un paquet de cigarettes ou des médicaments. Savoir que quelqu'un pensait à moi, ça m'a vraiment fait quelque chose. Elle est une sorte de Mère Teresa».

A 62 ans, les années de lutte ont creusé ses joues et cerné ses yeux bleus. Mais Hélène ne peut se permettre de baisser les bras. Car le combat continue.

Michaël est libérable depuis février 2012, comme tous les détenus qui ont effectué les deux tiers de leur peine. Mais lui reste derrière les barreaux. «Je vois tous les Indonésiens partir, sauf moi».

Si Michaël sort maintenant, c'est en liberté conditionnelle, donc en Indonésie. Or l'immigration refuse de lui accorder le droit de séjour. Voilà le Français pris dans le maelström d'une bureaucratie kafkaïenne.

Il reste environ trois ans et demi à Michaël, effondré à la perspective de fêter en prison ses 40 ans, le 15 juin prochain.

«Les choses sont toujours bloquées», lâche-t-il, confessant avoir demandé à sa mère à plusieurs reprises de «partir faire sa vie». «Dans un sens, elle est en prison avec moi ici».

Hélène avoue avoir parfois la nostalgie des «pentes enneigées» de Faucigny, son village en Haute-Savoie.

Mais elle n'est pas femme à perdre espoir. Et dans sa maison très rudimentaire, la plus belle pièce est réservée à Michaël, où l'attend un grand lit aux draps impeccables. «J'ai fait sa chambre», lance fièrement la Mère Courage, un grand sourire aux lèvres.

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