Salman Rushdie juge tragique que l'islam «régresse à ce point»
Reuters
L'écrivain britannique Salman Rushdie, objet d'une fatwa du régime iranien appelant à son exécution pour la publication en 1988 des Versets sataniques, roman jugé blasphématoire, déplore la régression de l'islam actuel, «comme une blessure auto-infligée». Le romancier d'origine indienne publie ses Mémoires sous le titre Joseph Anton, son pseudonyme de fugitif depuis que sa tête a été mise à prix par une fondation religieuse iranienne après la fatwa de l'ayatollah Khomeyni.
Homme traqué, vivant sous protection policière, Salman Rushdie, qui a grandi dans une famille musulmane, estime dans une interview au Monde, daté du 21 septembre, que la fatwa le visant était «le début d'un conflit plus large». Dans ses Mémoires, il livre un jugement sévère sur l'islam alors qu'un film dénigrant la religion musulmane, réalisé aux Etats-Unis sous le titre L'innocence des musulmans et diffusé sur YouTube, a provoqué de violentes manifestations dans plusieurs pays musulmans.
«Quelque chose a mal tourné au sein de l'islam»
«C'est vrai, explique Salman Rushdie dans Le Monde, ma vision des choses est plus tranchée aujourd'hui. Il faut dire que j'ai traversé une épreuve qui m'a obligé à prêter attention à ce qui se passait dans le monde musulman». «Or quelque chose a mal tourné au sein de l'islam. C'est assez récent», juge-t-il. «L'islam dans lequel j'ai grandi était ouvert, influencé par le soufisme et l'hindouisme, ce n'est pas celui qui est en train de se répandre à toute vitesse. C'est pour moi une tragédie que cette culture régresse à ce point, comme une blessure auto-infligée», dit le romancier.
«Je pense qu'il y a une limite au-delà de laquelle vous ne pouvez plus blâmer l'Occident. (...) Cela dit, s'il y avait le moindre signe qu'une société musulmane était capable de créer une démocratie ouverte, je changerais d'avis», ajoute-t-il. Selon Le Monde, la fondation religieuse iranienne qui a mis à prix la tête de l'écrivain en 1989 a porté à 3,3 millions de dollars la prime pour son assassinat à la suite des troubles provoqués par le film islamophobe