VIDEO. Le maître des herbes Jean Sulpice élu cuisinier de l'année par le guide Gault et Millau
GASTRONOMIE•Il transforme les herbes en émotion: Jean Sulpice, chef et propriétaire de l'Auberge du Père Bise, à Talloires sur les rives du lac d'Annecy, est désigné cuisinier de l'année par le guide Gault et Millau 2018...Stéphane Leblanc
«Il faut voir Jean Sulpice cueillir ses herbes à quatre pattes avant de transformer leurs saveurs et leurs parfums en émotion, s’exclame Côme de Chérisey, le patron du guide Gault et Millau, qui ne tarit pas d’éloge sur une cuisine de lac et de montagne du chef de l’Auberge du Père Bise qui courrait dans l’herbe, comme la souris verte, avant de se retrouver désigné chef de l’année 2018.
Ainsi, après Yannick Alleno, Alexandre Gauthier ou encore Alexandre Couillon l’an dernier, c’est au tour de ce cuisinier « solide », ce « battant », ce « compétiteur », selon les mots d’un Guide jaune aimant filer la métaphore sportive, d’accéder à la plus haute marche du podium.
Ancien élève de Marc Veyrat
« A Val Thorens, à près de 3000m d’altitude, l’ancien élève de Marc Veyrat avait déjà montré qu’il était un fin technicien », note Côme de Chérissey, pas peu fier de souligner la trajectoire d’un chef « en pleine maturité » dont la cuisine « paisible et fulgurante, souple et pointue, porte une vision », où « chaque ingrédient conjugue les saveurs pour créer l’instant parfait ».
Mais qui est Jean Sulpice ? Un cuisiner savoyard de 39 ans, « bien ancré dans mon terroir », précise-t-il avant d’ajouter : « Une partie de mon travail consiste à essayer de retrouver mes souvenirs d’enfance et de les remettre au goût du jour ». Jean Sulpice estime que le goût, « c’est ça, le plus important », en tirant la langue et la pointant du doigt, comme le faisait Marc Veyrat, dont il fut l’élève, avant lui.
Lac et montagne
A l’Auberge du Père Bise, « tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté », comme l’écrivait Baudelaire dans L’invitation au voyage. Il faut effectivement avoir goûté à cette cuisine où les ingrédients importants de chaque plat viennent du lac ou de la montagne pour y croire.
Il faut avoir dégusté le caviar au cresson imaginé comme un petit nid pour s’apercevoir que c’est bien le cresson qui, par son amertume et sa fraicheur, joue le rôle majeur. Il faut avoir apprécié la finesse du velouté de topinambour au foie gras qui accompagne une huître Papin-Poget pour comprendre à quel point son équilibre iodé-salin-fumé est à l’image d’une cuisine entre force et douceur, contraste et volupté. Le Guide Gault et Millau parle de plats « fulgurants de puissance dosée et d’immédiate séduction ».
Ah ! Cette énorme langoustine de Porcupine avec sa crème de livèche. Oh ! Cette côte d’agneau de lait, fondante comme jamais, « associée à la pimprenelle et aux noix fraîches de Grenoble qui arrivent », raconte le chef… Sans oublier son plat signature, un étonnant et sublime fromage de Beaufort réduit en mousse puis décoré de fleurs. « C’est mieux que la salade, non ? », rigole Jean Sulpice avec raison.
Dans un environnement d’une beauté à couper le souffle, ses plats se succèdent, tous différents, tous succulents. Et quand vient la fin du repas, on rêve de redemander un peu de ce calme, de ce luxe, de cette volupté que chérissait tant le poète…