METROPOLISPourquoi la mode de Brooklyn fascine-t-elle tant?

Comment les Brooklynais décident de ce que vous allez porter demain

METROPOLISDepuis plusieurs années, l'arrondissement new-yorkais obnubile les styles à l'international...
Aude Massiot

Aude Massiot

Brooklyn est partout. Marques de vêtements, publicité l’évoquant, ou simplement des logos imprimés sur des habits comme une revendication... On ne compte plus les références à l'arrondissement new-yorkais dans le milieu branché parisien. Pourquoi une telle fascination ?

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Don't mind if I do. Hello again NYC #parislovesBK

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Une photo publiée par @the_sai_life le 9 Avril 2014 à 18h31 PDT


Anya Sacharow, coauteure du livre New york street style, la mode made in Brooklyn (en librairie le 12 février, éditions de la Martinière) donne des clés pour comprendre ce phénomène. En voici quatre pour comprendre le style brooklynien et ce qui le rend si attrayant.

1) Ne pas se prendre la tête

L’auteure, dont la famille est originaire de Brooklyn et qui y vit depuis 1992, a interrogé des femmes emblématiques du quartier pour déterminer 'qu’est-ce que le style brooklynais' : « Ces femmes branchées (avec parmi elles, une boxeuse, une bouchère, une DJ, une styliste, une fleuriste et une propriétaire de magasin), m'ont répondu que tout un chacun peut créer son style Brooklyn. Car il s’agit surtout de s’accepter, d’oser être soi et de porter ce qui nous fait envie, indépendamment de la mode du moment. Ici, les femmes les plus stylées viennent d’autres pays, d’autres quartiers. »


La DJ Mauren Flax du duo électronique Creep, dans le cimetière Evergreen de Brooklyn. - Sioux Nesi

Pour choisir sa tenue, un motto : être bien dans ses vêtements, car qui sait ce qui nous attend au coin de la rue. « Je pense que ce qui charme autant à Brooklyn est l’attitude casual (informelle, désinvolte) des femmes ici, dans leur mode de vie mais aussi et surtout dans leur manière de s’habiller, décrypte Jenn Rogien, chef costumière des séries Girls et Orange is the new black. On quitte notre appartement en sachant qu’on ne va pas rentrer se changer après le travail. Il faut donc choisir une tenue qui convient pour tous les événements. » Pas de complexe donc à mixer un collier en diamants avec des baskets et un jean.

2) Se définir par ses vêtements

Si l’on doit être confortable dans ses sneakers à Brooklyn, il faut aussi s’y sentir soi-même. Personnalisés à l'extrême, les habits deviennent un moyen d’expression.

« Pour mes recherches pour Girls, j’ai passé beaucoup de temps dans le quartier à observer les gens qui y vivaient, décrit Jenn Rogien. Pour retranscrire cet état d’esprit à l’écran, j’ai voulu donner à chacune des filles un caractère unique à travers leur manière de s’habiller. Elles sont toutes très différentes mais incarnent en même temps le style brooklynais. »


Les soeurs Cipriana Quann et Tk Wonder dans leur quartier d'installation, Brooklyn. - Sioux Nesi

Quand il s'agit de choisir sa garde-robe, il n'y a pas d'interdits. Toutes les combinaisons de textures, de motifs et de couleurs sont permises, tant qu'elles s'avèrent originales et personnelles. La non-règle devient la règle. C'est le mot d'ordre de Jennifer Mankins, la créatrice des boutiques Bird (voir plus bas) qui a été désignée par le New York Times comme « la papesse du Brooklyn style ».

3) S’inspirer de sa tribu

Se référer à une tribu ne veut pas dire s’enfermer dans un carcan type 'je suis skatteuse', 'ethnique', 'rock' ou en encore 'street'. Pour Anya Sacharow, c’est assumer ses aspirations, ses origines et ses goûts pour les intégrer à son style. Brooklyn était originellement un quartier populaire peuplé par des immigrés venus principalement des Caraïbes et d’Amérique centrale. Cette culture cosmopolite fait toujours l'essence des lieux.

« À bien des égards, c’est ce melting-pot qui est à la base du style Brooklyn, explique Anya Sacharow. Plus de la moitié des habitants de l’arrondissement ne parlent pas anglais à la maison. » Selon le recensement, il y a autant d'Afro-américains que de Blancs : ils représentent environ un tiers de la population chacun. Ensuite, on trouve 20% de Latinos et 7% d’Asiatiques. La journaliste de mode Sofia Hedström, interrogée par Anya, y voit un moyen d'exprimer son style librement. « C’est plus facile d’être différente parce que les gens viennent de différentes cultures, raconte la jeune femme partie de Suède il y a dix ans pour s'installer à Brooklyn. Les gens parlent d’autres langues. C’est une contre-culture très libre. »

Une contre-culture qui attire tellement que les loyers ont flambé depuis quelques années. Il devient de plus en plus dur pour les jeunes créateurs et artistes de réaliser leurs rêves et venir s'installer dans les contrées fantasmées de Brooklyn.


Aurora James, la créatrice canadienne de la marque Brothers Vellies de chaussures éthiques a testé Los Angeles, avant d'élire domicile à Brooklyn. - Sioux Nesi

Greenpoint et Williamsburg sont maintenant fuis par les puristes qui y voient pulluler les boutiques de grandes marques internationales. Les quartiers Bushwick, Bedford-Stuyvesant et Crown Height sont en train de devenir les nouveaux spots des Brooklynaises trendy.

Les 10 adresses mode d'Anya Sacharow

A Williamsburg:

  • Bird, les boutiques de Jennfier Mankins proposent toute la panoplie d’une garde robe bohème de luxe. 203 Grand St. (entre Driggs&Bedford Avenue).
  • Antoinette, une belle boutique vintage qui charme par ses trouvailles à prix corrects des années 1970,1980 et 1990. 119 Grand st (Berry st. & Wythe Avenue).
  • KCDC, Amy Gunther accueille dans sa boutique dédiée au skate des skateurs de tous niveaux (et même les non-skateurs). Situé dans un vieil entrepôt, le magasin dispose d’une mini rampe indoor et d’une galerie d’art, tandis que chaussures et skates sont alignés sur les murs. 85 N. 3rd St. (Wythe Avenue).

A Greenpoint :

  • Beacon's closet, un dépôt-vente légendaire proposant un choix de vêtements vintage et modernes, d’un goût très sûr. 74 Guernsey St. (Nassau & Norman Ave).
  • Dusty Rose Vintage, Fouillez dans les bacs de vêtements dispersés un peu
    partout. Nous avons fait de belles trouvailles : des sneakers à 15 $ et des shorts en jean à 10 $. 251 Greenpoint Ave. (Provost st. & Mc Guinness Bvd)

A Bushwick :

  • Vice Versa, une friperie pas chère où on ne passe jamais un moment sans trouver une merveille. 71 White St. (McKibben & Boerum Sts.)

A Bedford-Stuyvesant/Crown Heights/Prospect Heights :

  • Cool Pony, friperie le jour, hotspot musical le soir : le genre d’association que l’on ne voit qu’à Brooklyn. 733 Franklin Avenur (Sterling & Park Pls.)
  • Installation, Israel David, le propriétaire, demande à Solange Knowles de sélectionner son stock de vêtements d’occasion, ce qui en fait un endroit unique. Et aussi plein de tee-shirts géniaux sur Brooklyn. 733 Franklin Ave. (Sterling & Park Pls.)
  • Rosebud Vintage at the Peacock room, du vintage grandiose – de la fin du XIXe siècle jusqu’aux années 1970 – et de grande qualité. Bien sûr, les tarifs ne sont pas ceux d’un dépôt-vente ordinaire, mais les articles sont souvent sublimes. 721 Franklin Ave. (Sterling & Park Pls.)

A BoCoCa (Boerum Hill, Cobble Hill, Carroll Gardens)/ Red Hook :

  • Erie Basin, Une belle sélection de bijoux du XVIIIe au XXe siècle. Outre les
    bagues de fiançailles à diamant, le propriétaire-collectionneur Russell Whitmore vend sa propre marque (EB), des bijoux créés à partir des pierres précieuses qu’il a trouvées au fil des ans. 388 Van Brunt St. (Dikeman St.)

>>> Et bien plus dans son ouvrage New York street style, la mode made in Brooklyn, coécrit avec Shawn Dahl (Ed de La Martinière, 2016).