INTERVIEWDidier Porte: «il est clair que je n'ai pas un humour très pro-gouvernemental»

Didier Porte: «il est clair que je n'ai pas un humour très pro-gouvernemental»

INTERVIEWLicencié de France Inter en même temps que Stéphane Guillon, le chroniqueur de Matinale et du «Fou du roi» revient sur les conditions de son départ...
Propos recueillis par Anne Kerloc'h

Propos recueillis par Anne Kerloc'h

Comment avez-vous appris votre éviction ?

Par une lettre de licenciement reçue ce matin. J’ai un contrat de grille, la lettre m’expliquait que dans le cadre de la refonte de la grille, mon contrat était supprimé, y compris ma chronique dans «Le fou du roi» alors que Stéphane Bern m’avait assuré que j’était renouvelé! C’est moi qui l’ai appelé pour lui annoncer la nouvelle, il était effondré. A part ça, la lettre n’indiquait aucun reproche particulier.

Avez-vous été convoqué par la direction pour vous annoncer que vos chroniques allaient être supprimées?

Non, il y a juste eu cette lettre. Par le passé, j’ai reçu un avertissement pour la fameuse chronique de «J’encule Sarkozy», un avertissement réglementaire avec accusé de réception. Mais je ne comprends pas mon licenciement. Normalement, on ne licencie pas après un unique avertissement.

Vous avez tenté de joindre Philippe Val, le directeur de France Inter ou Jean Luc Hees, président de Radio France pour plus d’explications?

Hmmm. J’ai le vague pressentiment que je vais avoir du mal à les joindre (rires).

Vous avez parlé à Stéphane Guillon, lui aussi évincé de l’antenne?

Oui, rapidement, car la journée est un peu folle, c’est le merdier. Mais on va se reparler.

Estimez vous que votre éviction est politique?

Depuis plus de dix ans, j’ai fait des centaines de chroniques, mon humour est assez politique et engagé, je ne l’ai jamais caché. Je crois savoir que le ministre Christian Estrosi a écrit à la présidence de Radio France pour se plaindre de moi et je sais que nous sommes aussi à deux ans des présidentielles… Il est clair que je n’ai pas un humour très pro-gouvernemental. Après, je ne me permets pas de faire des procès d’intention à la hiérarchie de Radio France.

Vous avez eu plusieurs discussions avec Philippe Val, par le passé?

Les seules fois où je l’ai vu, c’est quand j’étais convoqué dans son bureau pour me faire tancer. Hormis ces rares moments, nous n’avons jamais discuté, nous n’avons jamais eu de rencontre. Ce qui me donne à penser que cette histoire de chronique sur Sarkozy que l’on m’a reprochée est bien tombée. Bien sûr, je ne suis pas irremplaçable et je ne suis pas le seul à faire de l’humour transgressif. Mais France Inter a toujours été un îlot de liberté incontestable. Cette période est révolue et c’est inquiétant par rapport à l’avenir. Heureusement, je reçois des soutiens. De l’équipe du «Fou du roi», par exemple, et surtout des auditeurs.

Dans la mesure où vous vous sentiez menacés, Stéphane Guillon et vous-même n’en avez-vous pas rajouté dans la provoc’ et reculé les limites?

D’abord, je n’ai besoin de personne pour faire de la surenchère, ça fait dix ans que je surenchéris tout seul (rires). Ensuite, je suis père de famille, avec des responsabilités, alors le suicide professionnel que l’on me prête me fait doucement rigoler. Je compte me défendre et aller aux prud’hommes. Je ne laisserai pas acheter mon silence.