VIDEO. «Charlie Hebdo»: Cinq choses à savoir sur le numéro de ce mercredi
MÉDIAS•L'hebdomadaire satirique paraîtra ce 14 janvier comme chaque mercredi, une semaine après l’attaque terroriste qui a décimé sa rédaction…Anaëlle Grondin
Le numéro 1178 est bouclé. Charlie Hebdo sera bel et bien dans les kiosques ce mercredi 14 janvier, une semaine jour pour jour après l’attentat terroriste qui a fait douze morts et décimé la rédaction du journal satirique. Dès vendredi dernier, les survivants, accueillis à la rédaction de Libération, ont repris le travail pour montrer que Charlie n’est pas mort. Cinq choses à savoir sur ce nouveau numéro de l’hebdomadaire très attendu.
1. La rédaction a choisi de mettre Mahomet en Une
Le dessin de Une de la première édition de Charlie Hebdo depuis l’attentat est signé Luz. Cible des islamistes pour avoir souvent caricaturé Mahomet, la rédaction a choisi de représenter le prophète avec une larme tenant une pancarte: «Je suis Charlie», slogan mondial apparu après l’assassinat de Charb, Cabu, Wolinski, Tignous et Honoré. Au-dessus du dessin, le journal satirique titre «Tout est pardonné».
2. Un numéro normal, sans nécrologies ni hommages
Le rédacteur en chef de l’hebdomadaire Gérard Biard a indiqué: «On voulait pas faire un numéro nécrologique. On voulait pas être pleurnichard.» Lors de la première réunion de la rédaction au siège de Libération vendredi, il avait lâché: «Il y aura les rubriques habituelles, il y aura évidemment des pages qui seront consacrées à ce massacre.» «C’est un numéro dans le même esprit qu’avant. Leur idée, c’est de dire on continue comme avant. Le message c’est: on ne se laissera pas intimider», a déclaré de son côté Laurent Joffrin, le directeur de la rédaction de Libération. Richard Malka a raconté sur France Info lundi que l’équipe restante avait d’emblée décidé que le journal ne serait pas «un numéro hommage» car «ce n’est pas l’esprit Charlie». «On doit être fidèle à l’esprit du journal – et l’esprit du journal, c’est de faire rire», avait ajouté l’avocat. Tous les dessinateurs seront présents dans ce numéro daté du 14 janvier. Même Charb, Cabu, Wolinski, Honoré et Tignous, avec des dessins inédits. Il y a aussi des textes inédits des chroniqueurs Elsa Cayat et Bernard Maris, morts dans l’attentat, et une chronique non corrigée en hommage à Moustapha Ourrad, le correcteur, également assassiné par les terroristes. Riss, touché à l’épaule droite pendant la fusillade, a envoyé des dessins. Par ailleurs, des anciens collaborateurs à Charlie Hebdo, comme Jul, publient de nouveau, selon Le Figaro. Aucun dessinateur extérieur ne participe à ce numéro.
3. L’impertinence toujours au rendez-vous
Invité sur France Inter lundi matin, le dessinateur Luz a promis un numéro impertinent. Richard Malka, l’avocat de Charlie Hebdo, a rappelé le jour du bouclage que les caricatures religieuses étaient habituelles dans l’hebdomadaire depuis des années, et qu’il ne fallait pas s’attendre à une exception après l’attentat. «On ne cédera rien, sinon tout ça n’aura pas eu de sens. L’état d’esprit "Je suis Charlie"», cela veut dire aussi le «droit au blasphème», avait-il averti. L'AFP, qui a pu avoir ce numéro entre les mains en avant première, précise que la dernière page comporte un dessin de Luz qui montre des terroristes islamistes arrivant au paradis et demandent, déçus, «Elles sont où les 70 vierges?» et se voient répondre «Avec l'équipe de Charlie, tocard.» En double page, un grand dessin de Cabu, mort dans l'attentat, se moque des djihadistes en comparant leur départ pour la Syrie aux échanges Erasmus. Le numéro de mercredi caricature également Manuel Valls.
4. Trois millions d’exemplaires traduits en 16 langues
Ce numéro «des survivants» de huit pages sera malgré tout un numéro événement. Le journal sera mis en vente pendant quinze jours. Il sera tiré à trois millions d’exemplaires contre 60.000 habituellement. Il a été traduit en seize langues et sera vendu dans 25 pays. A l’export, où Charlie Hebdo ne vendait que 4.000 exemplaires, les MLP (Messageries lyonnaises de presse), le distributeur du journal, prévoient d’en expédier 300.000. «Tous les 27.000 points de vente de presse français en auront, contre 20.000 habituellement. Chacun en aura au moins une dizaine, mais certains plusieurs centaines», a précisé Patrick André, directeur général des MLP. Les MLP enregistrent par ailleurs depuis plusieurs jours des commandes émanant d’organismes divers qui réclament parfois des milliers de copies. Comme des maires qui veulent les offrir à leurs administrés, des entreprises à leurs salariés ou encore des théâtres aux spectateurs.
5. Un financement exceptionnel
En grandes difficultés ces derniers mois, le journal satirique a bénéficié d’un soutien financier exceptionnel après l’attentat. Selon Les Echos, le distributeur de presse Presstalis ne prendra aucune commission sur la diffusion de ce numéro. Le quotidien économique précise aussi que 250.000 euros seraient prélevés du fonds Presse et pluralisme géré par les éditeurs de presse français, un fonds provenant de la défiscalisation de dons de particuliers. Le géant du Web, Google, a également débloqué 250.000 euros issus du fonds innovation numérique de la presse pour aider le journal satirique. De son côté, la ministre de la Culture Fleur Pellerin a annoncé jeudi qu’elle comptait «débloquer en urgence» environ un million d’euros pour Charlie Hebdo, pour «assurer sa pérennité». L’association Presse et Pluralisme a lancé avec l’accord de l’hebdomadaire une campagne de collecte de dons auprès des particuliers qui souhaitent aider le titre.