Le Tour de France raconté par les journalistes et les écrivains

Le Tour de France raconté par les journalistes et les écrivains

MEDIAS – Plus que l’économie ou un match de foot, le Tour de France inspire journalistes et écrivains…
Alice Coffin

Alice Coffin

Le Tour de France fait vibrer les plumes. Les journaux le savent. Depuis le premier tour en 1903 ils sollicitent des «chroniqueurs vélocyclopédistes», des «cyclistes poètes», des «champions porte plume» comme les appelle Benoît Himermann, président de l’Association des Ecrivains Sportifs et auteur d’ Ils ont écrit le Tour de France. Une anthologie qui de Colette à Antoine Blondin – celui qu’on cite toujours car il a couvert 27 courses en 580 chroniques pour L’Equipe- recense les textes sur la Grande Boucle.
Pourquoi le Journal du Dimanche a-t-il fait appel à René Barjavel? Pourquoi cet événement, plus qu’une coupe du monde de foot e prête-t-il bien à l’exercice d’écriture? Les réponses de Benoît Himermann, et Victor Robert, journaliste à Canal+ et rédacteur en chef de la revue Desports.

Le premier journaliste à couvrir le Tour arrive après les coureurs

Himermann rappelle d’abord que le Tour a été crée par un directeur de journal. Henri Desgrange de L’Auto pour «créer un événement l’été et vendre davantage de papier». Au-delà de l’anecdote, «dès la première étape du premier tour même, le journaliste Géo Lefèvre qui suit le Tour pour l’Auto arrive en train, après les coureurs. Il est donc obligé d’extrapoler, de faire entrer du romanesque dans son récit pour raconter l’étape. Le travail d’écriture sur le Tour est une vraie tradition!» Les organisateurs le comprennent bien. En 1939, ils invitent 20 écrivains sur le Tour. Mais avec les retransmissions à la télé, l’explication de l’appel nécessaire à l’imagination pour les journalistes ne tient plus… «Oui mais c’est aussi l’époque où le Tour de France devient un reflet de la société, explique Benoît Himermann. Il y a un premier mort en 1967 et ce sont les romanciers, les auteurs de polar en particulier qui s’en emparent».

Le foot c’est de la tragédie, le cyclisme de l’épopée

Le romanesque donc. Mais aussi «l’épopée» estime Victor Robert. C’est trois semaines, c’est la traversée d’un pays, les ingrédients sont réunis». Bravo Victor, l’«épopée» c’est aussi le terme employé et par Roland Barthes et par Annie Ernaux pour parler du Tour de France alors que l’auteure estime qu’un un match de foot s’apparente, lui, «aux cinq actes d’une tragédie de Racine».

Dans le Tour on est toujours au bord du cataclysme

«Oui, estime Benoît Himermann, par rapport à d’autres sports, on peut comprendre que cela intéresse l’écriture car on interrompra pas comme à Roland Garros l’épreuve en cas de météo difficile, on est donc toujours au bord du cataclysme. C’est un sport individuel et collectif avec une reine des abeilles, des serviteurs, des lieutenants.»
Victor Robert confirme. «Le vélo, mais aussi la boxe, sont les deux sports qui sont les plus à même de fournir des histoires extraordinaires à écrire car ils favorisent, ou ont favorisé l’extraction sociale. A la campagne, pour le vélo, à la ville, pour la boxe».

Dans quels journaux bien lire le Tour de France ?

Mais, du coup, l’écriture du Tour de France, manifestation populaire par excellence, serait-elle le versant élitiste de la compétition? «Pas du tout, répond Himermann. Au contraire on voit que ce sont les journaux populaires comme L’Humanité ou France Soir qui se sont emparés du Tour, Le Monde, par exemple, malgré quelques tentatives n’a jamais été le support idéal. » Et cet été, qui lire ? «Au-delà des écrivains, le cyclisme est une vraie tradition dans les journaux note Himermann. D’ailleurs parfois ce n’est pas leur spécialité des journalistes qui font le Tour.». Exemple «Jean-Louis Le Touzet dans Libération!» s’exclame Victor Robert. «Jean-Emmanuel Ducoin, qui est en temps rédacteur en chef de l’Humanité. Comme Le Touzet c’est une grande plume, qui fait d’autres choses mais ne raterait pour rien au monde un Tour !».