GREVELes négociations prennent l'eau chez Fralib

Les négociations prennent l'eau chez Fralib

GREVESocial Septième semaine de grève dans l'usine, qui produit les sachets de thé Lipton et Eléphant
Stéphanie Harounyan

Stéphanie Harounyan

EDIT du 4 septembre 2023: Cet article a été anonymisé à la demande de la personne citée, en vertu du Règlement général sur la protection des données (RGPD) et du droit à l'oubli.

Les quelques chaises ont été installées sur un coin de gazon ensoleillé, juste sous les fenêtres du bâtiment administratif. En fond sonore, un haut-parleur sautille entre la Cane-Canebière et la Venise provençale. Hier matin, sur le site de Fralib, à Gémenos, les apparences paisibles cachaient une réalité autrement plus dure. Après sept semaines de grève sur le site, qui produit les thés Lipton et Eléphant, la direction a décidé mardi soir de mettre un terme aux négociations avec les salariés, qui réclament une hausse de salaire de 200 €.

Répartir équitablement les bénéfices
Le blocage a été décidé à l'issue des négociations annuelles obligatoires (NAO). La direction proposait une augmentation générale de 0,8 %, soit 16 €, plus 0,72 % d'augmentations individuelles. Les représentants du personnel tablaient sur beaucoup plus. « On a fait une étude sur l'évolution des salaires, explique Olivier Leberquier, délégué CGT. En 1989, le salaire mensuel pour un opérateur dans l'entreprise était à 46 % au-dessus du Smic et aujourd'hui, il ne se situe plus qu'à 3,5 % au-dessus. »
Pour les salariés de Fralib, filiale du géant Unilever, c'est une question de répartition équitable des bénéfices. « Le coût salarial sur une boîte de thé s'élève à 15 centimes, calcule Gérard Cazorla (CGT). Ces 200 € représentent 2 centimes de plus. Quand on sait qu'Unilever France a eu 1 milliard 50 millions d'euros de remontées en dividendes aux actionnaires en 2007-2008… »
Après sept semaines d'arrêt total de la production malgré treize tentatives de négociations, si des avancées ont été obtenues sur les conditions de travail, chaque partie campe sur ses positions. « Ces 200 € représentent 11 % de hausse de la masse salariale. C'est irréaliste », insiste le PDG de Fralib. Depuis plusieurs jours, lui et son équipe sont protégés par quatre gardes du corps. La réunion de la veille a certes été houleuse et hier, c'est sous les œufs et les huées que le patron a quitté le site. Pour lui, le débat est clos : « Nos propositions nous semblent raisonnables et compte tenu de la compétitivité du site, on ne veut pas aller au-delà. »

« On ne peut pas rentrer sans rien »
Toute médiation semble aussi exclue : après deux réunions avec la direction départementale du travail, la direction de Fralib n'a pas souhaité poursuivre. « Maintenant, il faut que les gens reprennent le travail, tranche le PDG de Fralib. Une action en justice est en cours pour obtenir l'évacuation du site. » Mais sous ses fenêtres, les grévistes n'ont pas l'intention de céder, même si le mois et demi de retenues de salaire va être dur à gérer. « Pour beaucoup, la crainte de reprendre dans ces conditions est pire que de perdre de l'argent, assure Marie-Ange, trente-cinq ans chez Fralib. Après sept semaines, on ne peut pas rentrer sans rien. » Pour l'heure, les salariés préparent de nouvelles actions.