Marseille: Avec La Marseillaise et une nouvelle tour CMA-CGM, la skyline gagne des gratte-ciel
URBANISME•Nouvelle icône sur les quais d’Arenc, la tour Jean Nouvel a été livrée cet été, d’autres projets de construction de grande hauteur prennent déjà le relais…Caroline Delabroy
L'essentiel
- La tour La Marseillaise, signée de Jean Nouvel, doit être officiellement inaugurée fin octobre.
- La CMA-CGM aurait déposé un permis de construire pour un nouveau gratte-ciel.
- En France, après 20 ans d’abstinence, la construction des tours a repris dans les années 2000.
Pour un peu, l’annonce de cette troisième tour des quais d’Arenc lui volerait la vedette. Alors que Jean Nouvel est attendu à Marseille le 24 octobre, pour inaugurer La Marseillaise, 135 mètres de haut au compteur, il se murmure très fort que la CMA-CGM a (enfin) déposé un permis de construire pour élever sur les quais d’Arenc un nouveau gratte-ciel, de 80 mètres de haut.
La compagnie maritime se refuse pour l’instant à commenter l’information parue dans Businews. Côté mairie, Laure-Agnès Caradec, adjointe à l’urbanisme, rappelle juste que le PLUI (plan local d’urbanisme intercommunal) « a élargi la possibilité de construire en très grande hauteur, pour permettre cette réalisation ». « La tour se fera, on n’a pas d’inquiétude là-dessus, poursuit-elle. La Marseillaise aussi on l’a attendue, et ça y est, elle est faite ». « Cela a un réel sens, estime Laure-Agnès Caradec. Dès l’origine d’Euroméditerranée, il y a eu l’idée d’une skyline avec l’émergence de tours pour marquer ce nouveau quartier d’affaires. Construire en hauteur permet aussi de dégager des emprises au sol. »
On doit déjà à la CMA-CGM l’acte 1 de la skyline littorale marseillaise, avec en 2011 la tour signée de Zaha Hadid, siège social de la compagnie de transport maritime, qui restera la plus haute de Marseille (145 mètres), selon l’engagement de Jean-Claude Gaudin à l’architecte. Contrairement à sa consœur, La Marseillaise n’est pas réservée à une seule compagnie. Les salariés d’Haribo sont déjà entrés dans les murs, mais le gros bataillon sera composé de la Métropole Aix Marseille Provence, qui a préempté 12 des 30 étages de la tour.
Deux prix Pritzker pour un début de skyline
Livrée fin juillet, la tour est tout en nuances de bleu, de blanc et de rouge. Elle paraît s’inscrire sans mal dans le paysage marseillais, et donne une impression visuelle de légèreté malgré l’usage du béton. Chez le promoteur Constructa, on rappelle que Jean Nouvel, dont c’est la première livraison d’un gratte-ciel en France, se classe parmi les architectes situationnistes, et « qu’il y avait dès le début l’idée d’avoir une tour qui allait le plus disparaître de la ville ».
« Avoir deux architectes de l’envergure internationale de Jean Nouvel et de la regrettée Zaha Hadid, tous les deux prix Pritzker qui se font face, c’est un formidable début de skyline, vous ne trouvez pas », se réjouit Marc Pietri, PDG de Constructa, qui porte le projet des Quais d’Arenc depuis plus de 15 ans. « A l’époque, il n’y avait pas l’esquisse de la Capitale européenne de la culture qui a profondément changé la ville, il fallait être visionnaire, il fallait aimer et croire en Marseille, il fallait accompagner et s’appuyer sur le grand projet qu’était Euromed 1. Le temps nous a donné raison, Marseille était orpheline d’un grand projet de promotion de bureaux qui répondait aux problématiques du territoire, à sa nouvelle dynamique. »
Une tour après l’autre
La suite de la skyline ne devrait pas se faire attendre. La « Porte Bleue », nouvel acte de l’aménagement des quais d’Arenc, pourrait démarrer en 2019, le permis de construire est en cours d’étude. Avec ses 56 mètres de haut, bien moins que les 113 mètres du projet initial (qui s’appelait alors Tour Horizon), le bâtiment a réduit ses ambitions de grande hauteur, par réalisme économique. Il doit accueillir une résidence hôtelière. Constructa a aussi dans ses tiroirs le projet de tour résidentielle H99, plusieurs fois repoussé, qui devrait prendre la suite vers 2024 et sera le point final aux quais d’Arenc. « Un bâtiment après l’autre, un est livré, on commence l’autre », assure le promoteur immobilier.
Pour Geoffrey Mollé, doctorant en géographie à l’université Lumière Lyon 2, et qui prépare une thèse sur le retour des tours résidentielles en France, la skyline marseillaise s’inscrit dans une dynamique commune à d’autres métropoles. « Pendant 20 ans, il n’y a eu quasiment aucune tour construite en France, observe-t-il. Cela a repris dans les années 2000, et dans les 11 plus grandes villes françaises, j’ai décompté 97 tours se construisant entre 2016 et 2020. » Pour lui, Marseille est un terrain propice, de par l’existence d’anciennes friches industrielles dans des quartiers proches du centre. Avec une spécificité en plus : « la vue sur mer qui fait partie du package ».