VIDEO. Var: «A La Seyne, les réseaux de stup sont très structurés, comme dans une entreprise»
STUPEFIANTS•Deux personnes sont mortes dans la nuit de dimanche à lundi à La Seyne-sur-Mer. Policiers et politiques dénoncent le manque de moyens face au nouveau narcobanditisme…Mathilde Ceilles
L'essentiel
- Deux personnes sont mortes dans un probable règlement de comptes à La Seyne-sur-Mer.
- Le narcobanditisme à La Seyne-sur-Mer prend de l'ampleur.
- Les acteurs locaux dénoncent un manque de moyens.
L’un était âgé de 19 ans et avait déjà côtoyé à cet âge-là le football professionnel, en tant que défenseur de l'ASSE. L’autre avait seulement 14 ans et était originaire de l’Europe de l’Est. Cette nuit, la commune varoise de La Seyne-sur-Mer, 64.903 habitants, a été le théâtre d’un probable règlement de comptes mortel.
Dans la même cité où s’est déroulé le drame, la cité Berthe, un autre jeune est décédé dans des circonstances similaires il y a un mois à peine. Dans la nuit du 3 au 4 août, un homme de 27 ans est mort après avoir été visé par des tirs en rafale de kalachnikov.
« Une situation qui s’enkyste durablement »
Dès la fin du mois de juin, le maire socialiste de la commune, Marc Vuillemot, avait alerté le gouvernement sur la situation de sa ville et d’autres cités autour de Toulon, marquées récemment par une recrudescence de la criminalité liée au trafic de drogue. L’édile sollicitait dans sa missive « une audience au regard de la gravité croissante d’une situation qui s’enkyste durablement ». Une demande laissée lettre morte malgré une relance en août.
« J’exerçais auparavant dans des cités marseillaises, et je retrouve à La Seyne-sur-Mer, et en particulier à la cité Berthe, des situations comparables à ce que j’ai pu connaître dans les cités marseillaises, raconte Hervé, policier dans la commune varoise et délégué départemental adjoint au sein d’Alternative police CFDT. Il y a dans cette ville, et notamment dans ses cités, des points de vente de stupéfiants à ciel ouvert, connus de tous. C’est un secret pour personne. Ce sont des réseaux très structurés, comme une entreprise. »
Une porosité entre les milieux marseillais et toulonnais
Et d’affirmer : « il flotte sur ces cités un engouement marseillais, et je ne serais pas étonné d’apprendre que les grosses têtes marseillaises veulent prendre le contrôle du trafic sur Toulon et son agglomération. » Pour rappel, la Seyne-sur-Mer est située à une petite heure de route de Marseille où un homme a perdu la vie dans la nuit de dimanche à lundi dans un autre possible règlement de comptes.
« Sans qu’on puisse l’assurer dans ce cas précis, on a pu faire la constatation d’une porosité entre le narcobanditisme marseillais et la région toulonnaise, indique à 20 Minutes une source au sein de la police judiciaire de Marseille, dont l’antenne toulonnaise est en charge de l’enquête. Ce n’est pas une nouveauté. »
« Manque de moyens »
Face à la situation, politiques et policiers se sentent démunis. Dans un communiqué, le président LR de la métropole toulonnaise Hubert Falco a déploré le « manque de moyens […] humains et matériels ». Il a demandé au gouvernement « de débloquer en urgence des moyens supplémentaires adaptés ».
Une requête appuyée par le maire de La Seyne-sur-Mer dans une déclaration à la presse ce lundi matin. « J’ai demandé dès cette nuit à la préfecture d’obtenir du ministère de l’Intérieur le déploiement de forces mobiles de nature à sécuriser la ville et participer à rassurer les habitants », indique Marc Vuillemot.
« On ne s’arrête pas quand on patrouille »
L’édile semble révolté par le fait que les promesses de renforts policiers du gouvernement « là où il y en a le plus besoin » soient restées lettre morte pour sa commune. La Seyne-sur-Mer avait demandé à intégrer le dispositif de police de sécurité du quotidien, demande rejetée par les autorités.
« Nous n’avons pas à La Seyne-sur-Mer les effectifs pour lutter contre ce fléau, affirme Hervé. Les trois départs en retraite de police secours n’ont pas été remplacés. L’organisation du commissariat ne correspond pas à une ville avec de la délinquance liée aux stupéfiants. Il n’est pas normal qu’à 18 h, il n’y ait presque plus personne. L’organisation n’est pas faite en fonction du terrain, elle correspond peut-être à une autre délinquance qui sévissait avant à La Seyne-sur-Mer. »
Un manque de moyens qui a des conséquences directes sur la sécurisation de la ville à en croire ce policer syndicaliste. « On fait des patrouilles qu’à deux ou trois par véhicule. Que voudriez-vous que l’on fasse ? On ne s’arrête pas quand on patrouille. A Berthe par exemple, à trois contre une équipe de narcotrafiquants, on ne va pas descendre faire un contrôle, on sera bloqué. La vie n’a pas de prix et je ne veux pas prendre cette responsabilité. Au quotidien, c’est l’enfer. Il faut un renfort des effectifs en urgence. »