Toulon-Toulouse: «Je ne savais pas si je rejouerais au rugby», souffle Vincent Clerc the survivor
RUGBY•Vincent Clerc, 36 ans, va vivre en tribunes le VincentClerico, entre son club actuel, le RC Toulon et le Stade Toulousain, ce dimanche (16h50)...Jean Saint-Marc
L'essentiel
- A 36 ans et après s'être rompu le tendon d'Achille, Vincent Clerc revient de nulle part.
- Il se confie à «20 Minutes» avant un match plein d'émotions, ce dimanche, face au Stade Toulousain, où il a passé 15 ans et remporté six titres majeurs.
- Un match qu'il ne disputera pas : le retour de Tuisova l'a propulsé hors du groupe.
Vincent Clerc n’est « pas superstitieux ». Mais un peu quand même. Il a connu ses trois plus grosses blessures face à Clermont, alors il n’était pas tout à fait serein, dimanche dernier, à l’heure de se déplacer au stade Marcel-Michelin. « C’est sûr qu’il y avait de l’appréhension… Reprendre contre eux, ça doit être le destin », souffle l’ailier du RCT. Qui respire : une semaine après, il est toujours sur ses deux pieds. Son tendon d’Achille gauche, totalement rompu en janvier dernier, a tenu.
Titulaire lors des deux premiers matchs du RC Toulon, cette saison, l’ancien Toulousain est un miraculé. « A son âge [il avait alors 35 ans], un retour au très haut niveau me paraît difficile. La cicatrisation est moins bonne, il y a une vraie fragilité », expliquait le médecin du sport Didier Fareau à 20 Minutes, en janvier dernier. Six mois plus tard, Clerc a déjoué les pronostics.
« Au début, ça aurait pu me faire lâcher. J’en ai discuté avec pas mal de monde, je me suis dit : “la seule chose que tu peux faire, c’est te donner à fond, pour le club. On verra où ça te mène, au pire tu seras en forme pour courir dans le jardin avec les enfants !” Je ne savais pas si je pourrais rejouer. J’avais une chance infime, mais il fallait la prendre. »
« Il avait vraiment les glandes - pardon pour l’expression - à l’idée de finir sa carrière sur une blessure », précise l’ancien joueur du RCT Aubin Hueber, un de ses proches. Admiratif, forcément, face aux efforts consentis : « C’est jamais évident de revenir, surtout au poste qu’il occupe. Il s’est donné les moyens d’être compétitif, ça montre bien le champion qu’il est, le mental qu’il a ! »
Des sacrifices financiers ?
« La seule incertitude, pour moi, ce n’était pas sa capacité à revenir au haut niveau, c’était que Mourad veuille bien re-signer », ajoute Yann Delaigue, un autre proche. Ledit Mourad (Boudjelall) l’a fait à quelques semaines de la reprise, profitant de son statut de chômeur : le salaire de Vincent Clerc n’est pas comptabilisé dans le cadre du salary cap. Il ne pèse toutefois pas bien lourd, si on comprend bien les sous-entendus. Très motivé pour rejouer, l'ailier a-t-il accepté des sacrifices financiers ? « Ça s’est fait naturellement, n’y a pas eu de négociations. Ce n’est pas des concessions. J’avais envie de jouer au rugby, les autres aspects, notamment financiers, étaient très loin », jure Clerc. Qui voulait aussi se « racheter » après une saison 2016-2017 presque blanche (trois matchs, aucun essai) : « Il y avait une certaine culpabilité par rapport à ça… Ils m’avaient fait confiance, je n’ai pas pu répondre présent ! »
Cette année, Vincent Clerc est bien là : il vient d’enchaîner deux titularisations lors des deux premières journées en Top 14. Tout sourire, il évoque « les sensations qui sont bien là » et martèle qu’il est ravi de sa préparation physique. C’est d’ailleurs le premier rugbyman qui nous parle avec enthousiasme d’une préparation estivale. Peut-être parce que c’était la dernière. « Je vais sans doute raccrocher en fin d’année », avoue sans peine l’ancien international. Sa reconversion est déjà lancée : il a cofondé avec Philippe Spanghero et Grégory Lamboley une société de communication et de marketing sportif (« Je ne suis pas encore opérationnel mais je me tiens au courant ! »)
On ne le retrouvera pas, à court terme en tout cas, sur un banc. « Pour la vie de famille, ce n'est pas tenable », explique Vincent Clerc, père de deux enfants. La plus grande vient d'entrer au CP. « Ça fait 16 ou 17 ans que je suis pris tous les week-ends, et si j'ai bien compris, être entraîneur, c’est encore plus chronophage… »