Marseille: «Mission Cléopâtre», une équipe de roller derby part en Egypte pour aider un club qui galère
OMNISPORTS•Ce n’est pas facile de pratiquer un sport féministe en Egypte…Jean Saint-Marc
Nom de code : «Mission Cléopâtre ». Dans un peu moins d’un mois, le 11 avril, les vingt joueuses et arbitres de l’équipe marseillaise des Bloody Skulls vont s’envoler de Marignane avec dans leurs bagages des patins, des casques, des protections en tout genre… Bref, l’attirail d’une joueuse de roller derby, sport féministe/de contact/déjanté (aucune mention à rayer) qui se développe à vitesse grand V.
Seulement deux matchs officiels en cinq ans d’existence !
C’est Margaïd Quioc (aka Kouign Karnage sur les patins) qui a eu l’idée de ce voyage de quatre jours, en partie financé sur la plateforme KissKissBankBank : « J’ai passé un mois au Caire, et je suis allé m’entraîner avec elles… C’est la seule équipe d’Egypte, elles galèrent énormément, donc on s’est dit que ce serait pas mal d’aller là-bas pour jouer un match. »
C’est avant tout ça, l’objectif de la manœuvre : leur permettre de jouer un match officiel. Ce sera seulement le deuxième dans l’histoire des Cairollers, alors que le club existe depuis 2012. « Pour une fois, on n’aura pas besoin de diviser notre équipe en deux pour jouer un match », résume Nouran Elkabanny, graphiste au Caire et membre, donc, de la seule équipe de roller derby égyptienne.
« Cette image de la femme agressive n’est pas forcément acceptée en Egypte »
Les Bloody Skulls vont aussi profiter du voyage pour offrir pas mal de matos aux Cairollers, partager quelques tactiques et « protips » à l’entraînement… Et pour discuter, comparer leur expérience de joueuses de roller derby. Margaïd Quioc va même en faire un documentaire, qui sera diffusé sur France 3 : « Lors de mon séjour au Caire, je me suis rendu compte que pour une jeune femme égyptienne, même si elle a fait des études, faire du sport ce n’est pas vu comme une priorité, plutôt comme une perte de temps. » Et le roller derby, dans tout ça ? « Cette image de la femme agressive n’est pas forcément acceptée en Egypte », reprend-elle.
« Traditionnellement, en Egypte, les filles pratiquaient plutôt des sports non agressifs, la natation, le squash ou le tennis, illustre Nouran Elkabanny. On a peu de boxeuses. Ma mère, par exemple, a toujours détesté les sports de combat ! Mais je ne sais pas s’il faut généraliser, j’ai le sentiment que c’est moins le cas aujourd’hui, qu’on voit de plus en plus d’Egyptiennes jouer au rugby ou boxer ! »
Une paire de patin ? Deux SMICS !
Susan Nour, prof dans un lycée international du Caire, un des piliers de l’équipe, va dans le même sens : « On reçoit bien une réflexion de temps en temps, du style “c’est un sport violent pour une femme”, mais ce n’est pas comme s’il y avait une énorme résistance ! » Pour elle, le nerf de la guerre… c’est l’argent. « On ne trouve pas l’équipement en Egypte, il faut l’importer. Si vous voulez une paire neuve de patins, il faut compter l’équivalent de 250 euros, à peu près… » Et c’est, à la louche, l’équivalent de… deux mois de salaire minimum !