Pêcheur, chanteur... et dernier du Vendée Globe: Sébastien Destremau a (enfin) terminé la course
VOILE•Le skipper est arrivé dans la nuit de vendredi à samedi… Retour sur une aventure qui a passionné les médias et le grand public…Jean Saint-Marc
«Un collègue m’a appelé et m’a dit “tu es un génie du marketing, avoir choisi le bateau qui finit dernier… Quel flair !” Mais je n’ai pas fait exprès moi ! » Christian Carme, PDG de TechnoFirst, est tout de même content de son coup. Pour sa première incursion dans le monde de la voile, la société basée à Aubagne, sponsor principal du Toulonnais Sébastien Destremau, s’offre un coup de pub inespéré.
Car Destremau a eu la bonne idée de boucler à la dernière place son tour du monde en solitaire. Le skipper varois est arrivé aux Sables d’Olonne ce samedi à 1h40, après 124 jours d’aventure et de galère (et avec un garde-manger quasi à sec).
« On ne fait pas le Vendée Globe si on veut rester anonyme ! »
« L’intérêt médiatique est colossal, racontait plus tôt dans la semaine le skipper à 20 Minutes. Et si j’ai bien compris, le dispositif pour l’arrivée est démentiel, avec des télés nationales, une retransmission en direct de la remontée du chenal… » Les chargés de com' du Vendée nous confirment : « de nombreux médias reviennent pour le dernier, pour clôturer l’événement ! »
Sébastien Destremau n’en tire donc « aucun crédit, aucune gloriole : il se trouve juste que le dernier, c’est moi ! » La folie médiatique qui l’attend ne lui fait pas peur (« on ne fait pas le Vendée Globe si on veut rester anonyme »). Les « milliers de personnes sur le ponton pour fêter mon arrivée », un peu plus. Mais il « ne sait pas si les Vendéens se déplaceront en masse ! »
En plein week-end, et vu les circonstances de sa course, on parie que oui. Sébastien Destremau a le profil parfait du skipper qui passionne : des galères, un océan de retard quand les premiers sont arrivés, une improbable chanson composée sur le bateau et de très visuelles tentatives (foirées) pour pêcher de quoi améliorer l’ordinaire.
« Choupinet » a réussi à éviter les baleines
« L’important, c’est de se démarquer, témoigne Karen Leibovici, dernière du Vendée Globe 2004-2005. Moi, le fait d’être une fille a attiré les médias. La dernière place aussi ! » Pour elle, cette passion pour les losers (désolé Sébastien, disons plutôt les anti-héros) est le sacerdoce de la voile, sport suivi avant tout par des spécialistes. « Le grand public, lui, préfère le côté aventure au côté sportif, à la voile pure », poursuit Karen Leibovici.
Les médias généralistes aussi. Prenons l’exemple de Laëtitia Gayet, journaliste à France Inter, qui s’est prise de passion pour Sébastien Destremau : elle l’appelait « choupinet » et avait lancé un gimmick « go, go, Destremau » tous les jours, à la fin de son flash de 10 heures.
« Dans l’absolu, je ne suis pas la voile ! C’est venu par hasard, en regardant la carte et l’écart avec les premiers. Je me suis dit, “c’est mortel ce qu’il fait !” C’est devenu mon running gag. Et je suis très contente de ma connerie, tout le monde l’a entendu ! » Et le navigateur lui a fait un clin d’œil dans une vacation vidéo.
« Je suis verte, je ne bosse pas le week-end… J’aurais préféré qu’il arrive plus tôt ! », se marre la journaliste. Car oui, ne l’oublions pas : Sébastien Destremau, dernier ou pas, va surtout boucler son Vendée Globe. « Il n’est pas vraiment dernier, il est 18e sur 29 participants, reprend Christian Carme. Le pire scénario pour un sponsor, c’est la casse. »
C’était « le deal » avec Destremau, raconte-t-il en rigolant : « tu te débrouilles comme tu peux mais tu rentres. Tu évites les baleines, tu évites les conteneurs à moitié immergés ! » Mission accomplie.
« On commence quand même à se dire vivement que ça se termine », répondait Destremau en début de semaine, entre un repas très très allégé et une énième tentative pour faire démarrer son moteur… « Comme une tondeuse à gazon, oui oui… Et ça fait plus de 100 jours, que je le démarre, ce moteur… C’est bon, c’est assez ! »