Des Aixois inventent un tee-shirt connecté qui détecte les prémices d'un AVC
SANTE•Ces tee-shirts et ces brassières connectés vont être commercialisés en avril prochain...Jean Saint-Marc
C’est une blague que les cardiaques se racontent souvent : « Chez le cardiologue, t’es en pleine forme… Et tu t’effondres en sortant du cabinet. »
« C’est malheureusement vrai, se désole le docteur Jean-Michel Tarlet. Je souffrais de ne pas connaître le rythme cardiaque de mes patients chez eux… C’est comme ça que nous avons eu l’idée de ce tee-shirt », raconte ce cardiologue aixois.
C’est son ami - et patient - Pierre-Paul Goiffon qui lui a assuré que la technologie des textiles connectés permettait désormais cette invention. Quelques années plus tard, les deux Aixois ont créé leur start-up, @-Health, bientôt cotée en bourse (en février ou mars) et qui commercialisera dès avril des tee-shirts et brassières connectées.
Toutes les dix secondes, les deux capteurs (de 45 millimètres de diamètre seulement) enregistrent un électrocardiogramme complet. Toutes les 30 secondes ils l’envoient, via le smartphone, sur les serveurs d'@-Health. Là, un algorithme fait le tri : « Il détermine si vous êtes juste en train de monter un escalier quatre à quatre ou si vous faites une fibrillation auriculaire [les prémices d’un AVC] », précise David Coulon, directeur technique de la jeune société. En cas de souci, les deux infirmiers et le cardiologue présents 24 heures sur 24 sont sollicités. Ils posent un diagnostic et peuvent alerter le médecin… Ou même appeler le SAMU en cas de grave accident.
Un abonnement à quarante euros par mois
« Auparavant, on n’avait aucune solution pour détecter les prémices d’un AVC (ou d’un autre problème cardiaque) en temps réel », précise le docteur Jean-Michel Tarlet. « Avec Cardionexion, vous êtes surveillés comme sur le lit d’une unité de soins intensifs sauf que vous pouvez vivre normalement et aller au restaurant », abonde Pierre-Paul Goiffon.
Le service est facturé 40 euros par mois, plus l’achat du tee-shirt ou de la brassière (125 euros, il passe bien sûr à la machine à laver !) @-Health est en contact avec des mutuelles qui pourraient rembourser l’équipement, avec des maisons de retraite qui pourraient équiper leurs patients. « On va bien sûr demander le remboursement de la sécurité sociale aussi… Mais c’est très long, surtout pour un dispositif moderne », souffle Pierre-Paul Goiffon, persuadé que de nombreux patients vont faire eux-mêmes l’investissement : « Quand vous avez fait un premier AVC, que vous vous êtes retrouvé aphasique ou paralysé… Vous réfléchissez très vite, surtout pour 40 euros par mois. »
Un babygros connecté pour éviter la mort subite du nourrisson
Pour l’instant une quinzaine de personnes testent le dispositif. « On a déjà sauvé des vies », assure Pierre-Paul Goiffon. Le docteur Tarlet précise : « On suit un quadra qui a fait un premier AVC en octobre. Il a parfaitement récupéré, mais les examens classiques n’ont pas permis de savoir ce qu’il avait. On l’a appareillé en décembre. Cinq semaines après, il faisait une fibrillation auriculaire. On a pu identifier son trouble du rythme et lui donner le bon traitement. »
Leur objectif est d’équiper 60.000 personnes d’ici trois ans. @-Health, qui emploie désormais deux personnes à temps plein (plus de nombreux prestataires), veut exporter son invention. La start-up envisage aussi de développer un babygros connecté pour éviter la mort subite du nourrisson. « La médecine prédictive en est à ses tout débuts, s’enthousiasme Jean-Michel Tarlet. Dans 100 ans, votre téléphone vous dira un matin que vous avez un petit cancer du côlon. Et ce ne sera pas grave du tout, puisque ce sera diagnostiqué très, très tôt ! »