Marseille: La Corsica Linea se lance à l'assaut de la saison estivale
ECONOMIE•La nouvelle direction de la Corsica Linea a présenté son plan d'action pour la saison estivale...Mickael Penverne
Sans attendre la décision du tribunal de commerce sur la reprise de l’ex-SNCM le 18 mai, la direction de la Corsica Linea a présenté mardi les grandes lignes de son projet pour redresser la compagnie à quelques semaines du lancement de la saison estivale. Et cela commence par un changement d’hommes avec un nouveau directeur général, Pierre-Antoine Villanova.
Agé de 47 ans, cet ingénieur de formation a passé l’essentiel de sa carrière dans le groupe Suez. D’abord, dans sa filiale chargée du traitement des eaux, Degremont, puis dans sa filiale chargée du traitement des déchets, Sita. Corse (d’Ajaccio) comme les 15 actionnaires principaux de Corsica Linea, Pierre-Antoine Villanova veut apporter un management « de proximité », « pragmatique » et avec une « forte relation client ».
Développement du fret
« L’entreprise est plutôt fatiguée. Elle a vécu 18 mois compliqués mais elle a fonctionné quasi normalement », a-t-il fait remarquer lors de sa première conférence de presse à Marseille. Celle-ci s’est déroulée à bord du Jean-Nicoli, le seul navire, pour l’instant, à arborer les nouvelles couleurs (rouge et blanc avec la tête de Maure) de la compagnie.
« Nous sommes sur un marché tendu mais on peut y vivre. Et même y gagner un peu d’argent », a-t-il ajouté. Avec des entrepreneurs corses comme seuls actionnaires, la nouvelle direction compte d’abord, assez logiquement, augmenter le fret entre l’île et le continent. L’ex-SNCM représente aujourd’hui 43 % des parts de marché du fret sur la Corse. La compagnie veut aller plus loin et « se développer », a indiqué Pierre-Antoine Villanova sans plus de précision.
Baisse des prix
L’autre chantier, c’est la « relation client ». Avec 450.000 passagers par an, l’ex-SNCM ne représente que 12 % des parts de marché des passagers entre la Corse et le continent. Le nouveau directeur général veut atteindre « 30 % assez rapidement ». Pour cela, il promet de mettre en place une « nouvelle culture du client » qui passera par l’amélioration de l’accueil : « Il faut que les vacances commencent à Marseille ».
Dans quelques jours, la compagnie donnera aussi le top départ d’une guerre des prix, notamment avec sa grande concurrente, la Corsica Ferries, qui assure ses rotations au départ de Toulon et Nice. La nouvelle direction promet ainsi des « décrochages tarifaires » de 30 à 50 % en fonction des « clientèles visées » - les familles constituant la priorité de la compagnie.
La réussite de la saison estivale est capitale pour la nouvelle direction qui veut présenter un « plan d’investissement » à ses banques (Crédit Agricole corse et CEPAC principalement) lors du second semestre 2016. Ce plan devrait porter sur l’ouverture de nouvelles lignes (avec la Sardaigne par exemple) et le renouvellement de la flotte (la Corsica Linea possède six navires).
Fait accompli
En attendant, la compagnie a rendez-vous le 18 mai avec le tribunal de commerce de Marseille qui a été saisi par une partie des représentants du personnel du comité d’entreprises sur la cession de Maritima Ferries à la CM Holding, propriétaire de Corsica Linea. En décembre, le tribunal avait nommé en effet Patrick Rocca comme repreneur de la SNCM, et avait rejeté la proposition de Corsica Maritima.
Or, six mois plus tard, Patrick Rocca ne fait même plus partie de la direction et c’est bien le consortium Corsica Maritima, désormais CM Holding, qui a pris le contrôle sur la compagnie, mettant ainsi le tribunal de commerce devant le fait accompli. Pourtant, Pascal Trojani n’avait pas l’air « très inquiet » à ce sujet. Quant à Pierre-Antoine Villanova, il pense, lui aussi, que le « bon sens l’emportera ».
Le principe d’autorité
Un autre point d’interrogation pèse sur l’avenir de la Corsica Linea : la délégation de service public (DSP) qui se termine en septembre et le projet de compagnie régionale de l’assemblée de Corse. Le président de l’Office des transports corse (OTC), Jean-Félix Aquaviva, est venu préciser la semaine dernière à Marseille le projet de la majorité nationaliste : la collectivité veut acheter les bateaux de la compagnie qui aura la prochaine DSP, et même entrer dans son capital.
« Les discussions de gré à gré se passent bien », avait indiqué Jean-Félix Acquaviva. Avant d’ajouter : « Sinon, il reste le tribunal »… Mardi, Pascal Trojani, le dos rond, ne s’est pas montré très disert sur le sujet : « Les discussions sont longues. Elles avancent mais on ne sait pas vers quoi elles vont nous mener », a-t-il reconnu. Avant de rappeler que la collectivité territoriale de Corse restait « l’autorité délégante » de la DSP, sans quoi la Corsica Linea ne pourrait « continuer ».