ECONOMIELes commerçants du centre-ville réclament une zone franche

Marseille: Les commerçants du centre-ville veulent une zone franche

ECONOMIELes commerçants réclament la création d’une zone franche en « cœur de ville », comme à Toulon…
Mickael Penverne

Mickael Penverne

Les Bouches-du-Rhône sont-elles en train de devenir un centre commercial géant ? C’est la question posée par la fédération Terre de commerces qui s’alarme de la « boulimie de constructions commerciales » dans le département. Le Village des marques à Miramas, la zone commerciale des Gabins à Salon-de-Provence, le centre commercial du Vélodrome à Marseille, Istropolis à Istres… Selon Jean-Luc Gosse, président de la fédération, ce sont « 100.000 m2 de zones commerciales qui vont bientôt sortir de terre ».

« On charge de plus en plus la mule, explique-t-il rageusement. La densité commerciale est devenue aberrante et ne correspond en rien aux besoins ». Surtout, elle menace les petits commerces indépendants des centres-villes qui ne peuvent pas faire concurrence avec des groupes « qui ont des sièges sociaux à l’étranger et défiscalisent ». Terre de commerces demande donc le « gel immédiat de tous ces nouveaux projets dans l’attente d’un état des lieux économique et commercial à l’échelle de l’ensemble du territoire ».

Les métropoles sauf Marseille

Selon les résultats d’une enquête nationale parue en octobre 2015, les « petits commerces » sont de plus en plus fragilisés partout en France. En 1920, le pays comptait 1,5 million de boutiques. Un siècle plus tard, il n’en reste plus que 850.000. Dans le même temps, la population a quasiment doublé passant de 38 millions à 66 millions d’habitants. Cette étude, menée par la Fédération Procos, souligne aussi le parc de surfaces commerciales croît à un rythme plus rapide (+2,8 % par an entre 1992 et 2003) que celui de la consommation (+1,8 % sur la même période).

Sur le terrain, cette crise du « petit commerce » se traduit notamment par l’augmentation de la vacance commerciale, c’est-à-dire les locaux inoccupés. D’après l’enquête de Procos, elle atteignait en moyenne 7,8 % des cellules commerciales en 2013. Elle s’élevait à 6,3 % en 2001. La fédération d’enseignes spécialisées précise que le phénomène de vacance commercial concerne davantage les petites et moyennes villes (en dessous et autour de 100.000 habitants) que les métropoles qui, globalement, « résistent » mieux. Excepté peut-être Marseille.

Toulon comme exemple

Ici, le taux de vacance commercial dans le centre-ville se situe entre 10 et 15 %, soit quasiment deux fois plus que la moyenne nationale. Travaux sur le Vieux-Port et la rue de Rome, concurrence des centres commerciaux périphériques, paupérisation de l’habitat… Plusieurs explications peuvent être avancées. Pour sortir de l’ornière, les commerçants marseillais se sont intéressés à l’exemple d’une ville voisine : Toulon. En 2006, la ville a accueilli la première zone franche en « cœur de ville » de France.

Prorogé une première fois en 2011, le dispositif a été prolongé en 2014 jusqu’en 2020. La dernière version, rédigée par le ministre de la ville Patrick Kanner, prévoit pour les commerces de proximité une exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant cinq ans, ainsi qu’une exonération de la cotisation foncière des entreprises et de la cotisation sur la valeur ajoutée pendant huit ans. Selon Johan Bencivenga, président de l’UPE 13, cette politique a porté ses fruits.

Travailler en bonne intelligence

En dix ans, le taux de vacance commercial est passé de 21 à 16 %, assure-t-il. Un millier d’emplois ont été créés ainsi que 845 « nouvelles activités » - comprenez, des commerces. « C’est donc possible », remarque-t-il laconiquement. L’UPE 13 et Terre de commerces demandent au gouvernement de créer la même chose à Marseille : une « zone franche urbaine commerciale » avec des exonérations de charges sociales en échange d’emplois créés.

Les deux organisations demandent également aux élus locaux « de travailler avec (elles) en bonne intelligence pour monter le dossier et aller ensuite le défendre à Matignon ». « Le centre-ville s’est vraiment paupérisé, insiste le président de l’organisation patronale. Marseille est une ville de plus en plus touristique mais les circuits touristiques ne passent pas par le centre. On a donc un potentiel merveilleux mais sans un petit coup de pouce, cela va être très difficile, et surtout très long ».