OM: Qui était Christine Vallette, supportrice Ultra décédée le jour de Noël ?
FOOTBALL•Un mémorial éphémère a été dressé devant le Stade Vélodrome ce dimanche…Christine Laemmel
On n’aime pas trop donner son nom chez les Ultras. Pas spécialement celui de Christine Vallette, non. Mais les supporters se plaisent mieux dans l’anonymat du groupe. Celui de la fana de 43 ans disparue au matin de Noël ne sera pas gravé dans le marbre sur une plaque clouée sur le béton encore frais du Vélodrome. « Elle aurait dit "mais qu’ils sont cons", rebondit d’emblée l’un d’entre eux quand on lui demande de décrire Christine. Quand elle se mettait en avant, c’était pour défendre les Ultras. Elle nous engueulerait… Mais nous, on est obligés de faire un truc. »
« Un stade, c’est fait pour chanter »
Ni minute de silence, ni applaudissements dimanche soir contre Guingamp. Juste un mémorial éphémère pour recueillir bougies, fleurs ou petits mots, après les centaines de mails reçus. Et un hommage pendant le premier match de Ligue 1 de 2016.
« Mémorial en l'honneur de Christine Vallette, membre des Ultras décédée le 25/12 #OMEAG pic.twitter.com/YsZa0YDYHM — Christine Laemmel (@laemmelc) January 10, 2016 »
« Un stade, c’est fait pour chanter, poursuit le jeune homme, sûr de lui. Le plus bel hommage qu’on peut lui rendre, c’est de mettre une belle ambiance. C’est se dire d’en haut qu’elle est fière de nous, que son virage il vibre, il chante. »
Ultra parmi les Ultras, Christine « se donnait corps et âme » depuis plus de 25 ans. Pour tout. Engagée à gauche, au quotidien dans une association de logement de personnes défavorisées, et le soir au local du 180 boulevard Rabatau. « Quand on finit la journée de travail, on reste pas sur son canapé avec son copain ou sa copine, on vient au local ou on va en déplacement. » Christine était de ce pedigree de supporter là.
Vincent Labrune a été impressionné
Dans la salle principale du QG des Ultras, aux hauts murs remplis de vieux maillots, photos et lumières douces, ça grouille. On est à trois jours de la reprise. Une voix manque dans le bourdonnement. Celle de Christine. Pas la plus forte. Personne ne hurle ici. Mais la plus tenace peut être.
« Elle avait réponse à tout, mais argumentait toujours de manière construite et posée », décrit un jeune Ultra avec pédagogie. Celui qui est assis à ses côtés a deux fois son âge mais le même discours, débité avec entrain et bienveillance. « Elle avait toujours une idée sur tout. Je vois l’affiche du mondial anti-racisme derrière. Elle y est depuis 15 ans. Elle avait une ouverture et un avis qu’elle ne mâchait pas. Bon ou mauvais, elle le donnait et elle faisait participer. »
Lutter contre le racisme faisait partie des combats de Christine Vallette et anime toujours les Ultras - C.L
Même Vincent Labrune, en visite dans les locaux à la fin de l’année, a savouré la répartie du personnage. « Il a été impressionné, il l’a dit lui-même. Elle était malade mais continuait à mener la discussion. » Le 18 décembre, l’avocat des Ultras et un de ses plus vieux membres étaient encore dans sa chambre d’hôpital à discuter de la convention sur les abonnements.
« Elle ne fait rien mais elle fait tout »
Tête dure Christine, assurément, et dingue de la ville depuis toujours. L’OM a suivi naturellement dans les années 80-90. « Marseille et le club faisaient beaucoup plus un qu’aujourd’hui. » Comme le reste du groupe, ces derniers temps, « elle luttait beaucoup contre la répression qui touche les Ultras. »
Deux membres des Ultras dont Christophe Bourguignon (en bas), dessinent un portrait de Christine Vallette qui sera déployé au Stade Vélodrome dimanche 10 janvier 2016. - C.L
Au fond de la salle principale, un quadragénaire, tatouages dans le cou, trace minutieusement des traits indéchiffrables sur une feuille de papier d’au moins 10m². « Christophe fait toutes les animations depuis 30 ans. C’est son truc. Christine, elle, ne fait rien mais elle fait tout. Du coup, tout le monde la connaît. C’est pour ça que sa mort a touché autant de gens. »
Christophe, c’est Christophe Bourguignon, le président des Ultras Marseille. Christine, elle, était secrétaire, nous dit-on au passage. On n’aime pas trop avoir un grade chez les Ultras. Mais on laisse de la place à chacun. Celle de Christine reste béante.