Marseille : Ils demandent à être exonérés de la taxe d'habitation
Impôts•Une cinquantaine de dossiers ont été déposés au nom du collectif CGT chômeurs et précaires....Caroline Delabroy
Sonia, souriante fonctionnaire de 43 ans, a fait le calcul : une fois payé son loyer de 450 euros et ses différentes factures, il lui reste 8,50 euros par jour pour vivre dans le mois. A peine de quoi mettre de côté pour ses impôts locaux.
A 38 ans, Demba traverse une année difficile. Electricien au chômage, en couple avec deux enfants, il doit régler 786 euros de taxe d’habitation. « J’ai toujours travaillé et toujours payé mes impôts, mais cette année, il va falloir que je choisisse entre ça et le loyer, je ne pourrai pas tout faire », confie-t-il, un peu à l’écart du groupe qui se forme ce mardi matin devant le Centre des Finances publiques de la place Sadi-Carnot (2e).
Le nombre a doublé
Comme chaque année, le comité CGT chômeurs et précaires de Marseille dépose au nom du collectif des demandes d’exonération de la taxe d’habitation. Mais cette fois, estime la secrétaire départementale Soraya Bousmaha, « leur nombre a doublé par rapport à l’an passé ».
Après une quarantaine de dossiers déposés fin octobre, ce sont 50 nouvelles situations qui ont été portées mardi à la connaissance de l’administration fiscale. Il faut dire que d’une année à l’autre, les impôts locaux ont augmenté. Selon une étude du Forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales, Marseille enregistre en 2015 une hausse de 3,3 %, soit la plus forte augmentation après Toulouse, Lyon et Bordeaux.
« Comment je fais ? »
Pour Linda, 34 ans, cela s’est traduit par 100 euros supplémentaires sur sa feuille d’impôt. « Je dois payer cette année 1036 euros de taxe d’habitation, alors que je gagne 620 euros par mois, soit la moitié de mon salaire normal depuis que je suis en congé maladie pour un cancer. Comment je fais ? Je suis seule avec ma fille de 4 ans ».
L’an passé, cette habitante de « la rue le plus sale de la Joliette », comme elle dit, avait déjà échelonné en trois fois et payé des majorations de retard. Sa demande d’exonération n’avait pas abouti, elle espère que, portée collectivement, il en sera cette fois-ci autrement.
« Cela risque de prendre des mois »
« Quand on oblige les gens à payer, après ils vont demander des aides sociales à la CAF, on marche à l’envers », souligne Claudette Eichler, militante à la CGT chômeurs et précaires. Damien, 25 ans, attend toujours que son dossier d’aide au logement soit traité par la CAF. En attendant, il vit « grâce à la solidarité des amis et de la famille », et ne voit pas comment acquitter les 550 euros de taxe d’habitation pour son logement « pourri » de 32m² à la Plaine.
« Vu l’engorgement à la CAF, cela risque de prendre encore plusieurs mois », soupire-t-il, avant d’attaquer une « taxe vraiment injuste, qui se base sur des critères qui ne prennent pas du tout en compte l’état des logements et les populations qui vivent dedans ».
Selon Soraya Bousmaha, l’administration fiscale s’est engagée à répondre à ce dépôt collectif avant la date limite de paiement, reportée au 23 novembre. « Cette année, le reste à vivre va être pris en compte pour les familles vivant avec les minimas sociaux, souligne-t-elle. D’un côté, nous avons ainsi fait pour chaque dossier la colonne des revenus, et de l’autre des charges, pour bien faire ressortir les situations individuelles ».