«Vigouroux est pudique »
Serge scotto Il a recueilli les confidences de l'ancien sénateur-mairepropos recueillis paramandine rancoule
Auteur prolifique de romans, de bande dessinée, ou de tribunes… Serge Scotto enfile la casquette de biographe avec Les Silences rompus*. L'ancien sénateur-maire de Marseille, Robert Paul Vigouroux, 89 ans, se confie à lui à travers 250 pages d'entretiens d'abord, puis de récits personnels.
J'ai connu Robert dans sa vie d'écrivain, en 2000. Il s'est confié car je suis son ami, sinon, il ne l'aurait pas fait. Il a toujours laissé la parole aux autres car c'est un homme discret. Alors à force d'entendre n'importe quoi sur lui et poussé par sa femme, il a voulu faire sa biographie. Pendant deux ans, j'allais chez lui, je branchais le magnéto et on buvait un coup en parlant. J'ai 30 heures d'enregistrement. Au début, il voulait publier le livre à titre posthume et puis il s'est pris au jeu. Mais il fallu l'accoucher au forceps.
Il ne veut faire de tort à personne, il est pudique, discret. J'ai compris que c'était par rapport à son métier de neurochirurgien. Il était face à des gens forcément silencieux. En témoigne la couverture : là où n'importe qui aurait mis sa gueule devant Notre-Dame de la Garde, il a voulu mettre un sphinx, comme le surnommaient les journalistes. Parfois aussi, il parle par énigme, comme cette photo d'un escalier en colimaçon qu'il a choisi. Pour lui, cette image représente le sens de la vie.
Ce n'est pas que l'histoire d'un homme, c'est aussi celle d'une ville. Il a fait entrer Marseille dans la modernité en rompant avec les aspects noirs du defferrisme. Il a engrangé une véritable politique d'ouverture et de culture. Il a créé Marseille espérance, un groupe informel réunissant autour du maire les responsables religieux des principales familles spirituelles. C'est un homme travailleur, humaniste et courageux. Il est très à cheval sur sa vie privée et ne révèle que la partie en rapport avec l'Histoire. Mais il faut savoir lire entre les lignes. Il a aussi été médecin volontaire sur l'Exodus. Je l'ai découvert en regardant un documentaire quatre moi après le début des entretiens. Si je ne lui en avais pas parlé, il ne l'aurait peut-être pas fait. Il était temps de lui rendre justice. ■