Le retour de la Mouraria, le berceau du fado
PORTUGAL•Le quartier de la Mouraria, où le fado y est toujours très présent, devient de plus en plus branché...Christine Ludwig
De coupe-gorge, la Mouraria est devenu le quartier bobo de Lisbonne. Boudé par les circuits touristiques et associé jusqu’à peu à la drogue ou à la prostitution, voilà le quartier de la capitale qui a le plus changé ces dernières années. C’est au cœur de ses ruelles tortueuses qu’est né le fado, un genre de musique traditionnel et mélancolique typiquement portugais.
«C’est une musique qui vient des basfonds de la capitale portugaise. La population ici était très pauvre et a inventé ces mélodies pour pleurer sa condition misérable», explique Nicolas. Ce dernier vit à Lisbonne depuis cinq ans et organise des visites en français dans la Mouraria avec son association Lisbonne Ame & Secrets.
Aujourd’hui, presque toutes les maisons de fado se trouvent dans le quartier de l’Alfama, plus touristique. L’un des seuls lieux où écouter un concert reste Maria da Mouraria, une maison rendue célèbre par Maria Severa, considérée comme la créatrice du fado. D’abord prostituée, elle eut plusieurs amants, tous charmés par ses chants mélancoliques.
Mais la Mouraria insiste sur ce patrimoine pour redorer son image. L’association Renovar a Mouraria («réhabiliter la Mouraria»), créée en 2008, organise des visites chantées pour faire découvrir le quartier. Et les pionniers du fado sont mis à l’honneur. «Dans tout le quartier, de grands portraits en noir et blanc de chanteurs sont aussi disséminés sur les murs. C’est une œuvre de la photographe anglaise Camilla Watson», ajoute Natasha Penot, auteur du guide Un grand week-end à Lisbonne.
Branché mais authentique
Des initiatives qui font oublier sa réputation de quartier malfamé. «Au contraire, c’est en train de devenir un endroit très branché. On trouve des boutiques de créateurs et des restaurants», insiste Natasha Penot.
Pour autant, la Mouraria n’a pas perdu de son authenticité, entre ses murs décrépits et le linge qui sèche aux fenêtres. «Pour en sentir l’atmosphère, il faut venir se perdre dans les ruelles. Elles ne font parfois pas plus d’un mètre de large. On a l’impression de se promener directement dans les maisons des Lisboètes», raconte Nicolas, de l’association Lisbonne Ame & Secrets. Et au détour d’une rue, peut-être entendrez-vous une mélodie de fado car ici, les habitants chantent encore.