Naïve dans le conte, le personnage de Blanche-Neige reprend du pouvoir grâce à l’art
HEROÏNE•Depuis 1937, l'année de la sortie du film, la jeune fille trop candide est devenue une super woman...Laura Belleyme
Prenez une pomme bien rouge et brillante, un miroir, un jupon jaune, un ruban rouge... Ça y est vous êtes propulsé dans le conte de Blanche-Neige. Depuis sa sortie en 1937, l’héroïne naïve au teint pâle est devenue un mythe qui inspire les artistes d'aujourd’hui.
Rappelons-le, en écrivant ce conte, Grimm raconte l’histoire d’une jeune fille jalousée par sa belle-mère pour sa beauté. Elle est recueillie par des nains qui en font leur servante. Puis sa marâtre déguisée en sorcière lui offre une pomme empoisonnée. La jeune fille tombe dans le coma et est réveillée par un beau prince qui veut l’épouser.
Blanche-Neige devient guerrière
Bref, la pureté et l’innocence dans un même personnage. «Ce qui me semble assez clair, c’est que Blanche-Neige est le mythe cliché de la vierge qui doit apprendre à avancer doucement vers la féminité, vers l’homme etc», relève Richard Mèmeteau, professeur de philosophie et auteur du livre Pop-culture, Réflexions sur les industries du rêve et l’invention des identités. L’image est un peu dépassée au 21e siècle et les artistes ne s’y sont pas trompés.
Dans l’art contemporain, la figure de Blanche-Neige réapparaît régulièrement… en femme de poigne. Au cinéma, l’actrice américaine Kirsten Stewart interprète une héroïne en armure dans Blanche-Neige et le Chasseur. Idem dans le film Shrek. Si le personnage est toujours ami des animaux, c’est pour mieux attaquer ses ennemis en les contrôlant grâce à son chant de guerre.
D’autres artistes utilisent l’esthétique du personnage comme un symbole pour critiquer le monde merveilleux de Disney. C’est le cas du projet de la chorégraphe Catherine Baÿ: à travers le monde, des actrices déguisées en Blanche-Neige font des performances. L’artiste a voulu dénoncer une société devenue trop mercantile. «[Ce personnage] représentait cette nouvelle culture de masse où la consommation prend le pas sur l’imagination. J’ai donc écrit un livret dans ce sens: un monologue d’un personnage-otage de sa propre condition», raconte l'artiste.
"Blanche Neige" , performance - conception... par clairderien
Finie la «fille victime»!
D’autres, comme Jean-Luc Verna, ont décidé de lui rendre sa sexualité. Au fard, il a redessiné Blanche-Neige, reconnaissable grâce au nœud rouge dans ses cheveux. Extatique, elle est nue avec des bas et des oiseaux qui tirent sur des cordes reliées à des piercings… bien placés. «J’en ai fait une femme heureuse d’être nue, debout, qui a trouvé un moyen de prendre sa sexualité en main», explique Jean-Luc Verna. «J’ai réglé mes comptes en un dessin. Ce personnage de fille victime m’avait ennuyé quand j’étais petit.»
Pas étonnant pour Richard Mèmeteau, «Blanche-Neige est intéressante comme matériau de départ mais il faut l’armer, ou lui reprendre sa pudeur. On doit relire ce cliché.» Selon lui, Blanche-Neige fait écho à une autre héroïne. «Ce qui est resté, c’est le côté neige. Elle est remplacée par la Reine des neiges.» Autre gros succès de Disney, presque un siècle plus tard, la débrouillarde et indépendante Reine des neiges recueille l'approbation du public face à son ancêtre trop naïve. La preuve? Les déguisements d'Elsa font déjà fureur...
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