Rétro vers le futurPourquoi y a-t-il tant de nostalgie autour du jeu vidéo ?

Pourquoi y a-t-il tant de nostalgie autour du jeu vidéo ?

Rétro vers le futurLe vintage est à la mode, mais dans l’univers du jeu vidéo il dépasse largement le seul aspect esthétique
M. F.

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En ce moment Arthur, passe plusieurs de ses soirées à poncer le dernier The Last of Us. Mais lorsqu’il part en week-end avec des potes, c’est à l’ancienne avec Street Fighter II Turbo sur Super Nes. Le jeu fête ses 28 ans : Arthur fait ce qu’on appelle du retrogaming. « Le terme est apparu au début des années 2000 quand il a été possible de rejouer à d’anciens jeux sur les ordinateurs, via des émulateurs de plateformes, téléchargeables en ligne », raconte Philippe Dubois, président de l’association MO5 qui agit pour la préservation du patrimoine numérique en France. La pratique est illégale et les éditeurs de jeux vidéo entament une chasse aux pirates. Finalement en 2006 Nintendo change de stratégie et sort la Wii, équipée d’un logiciel de console virtuelle permettant de jouer à de vieux jeux. Microsoft et Sony lui emboîtent le pas avec la Xbox 360 et la PS3, toutes deux rétrocompatibles (enfin, très partiellement, s'agissant de la PS3).

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L’activité de niche réservée aux collectionneurs et passionnés, rentre alors dans la culture populaire. « Pour les quadras et les quinquagénaires, il y a une fibre nostalgique forte. On est nés avec le numérique. J’ai eu ma première console à 8 ans. C’est une révolution et une expérience culturelle qui vous bouscule », explique Philippe Dubois. Son association tient un espace à la Paris Games Week où sont branchées des consoles première génération et leurs jeux iconiques. Le président l’assure : chaque année le stand est rempli de parents qui montrent à leur progéniture une part de leur enfance. « Un pixel, une musique... Un détail vous renvoie immédiatement à une époque et un souvenir. C’est comme si on se goinfrait de madeleines de Proust », lance Patrick Hellio, journaliste chez Gamekult et auteur de Génération Jeu Vidéo.

Editeurs et constructeurs surfent sur le vent de nostalgie

Les éditeurs l’ont bien compris et ont de quoi répondre à la demande. Dix ans après la Wii, Nintendo commercialise la NES Mini et la NES Mini Classic, une version modernisée et compacte de la console des années 1980. Près de 3,56 millions d’exemplaires sont vendus à travers le monde. « Et en novembre prochain, Nintendo rééditera une Game & Watch, ces petites consoles portables des années 80, rapporte Patrick Hellio. Il y aura le super Mario Bros de l’époque, avec le confort et les technologies actuelles. »

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Mais pour Arthur, issu de la génération des millennials, la nostalgie autour d’un vieux Street Fighter se trouve surtout dans le gameplay. « Les manettes sont simples, sans fioritures, tu as juste besoin de maîtriser deux trois techniques pour jouer. Avec les versions actuelles, il y a une vingtaine de combos par personnage et les manettes sont plus complexes. » Impossible d’allumer la console et de s'éclater immédiatement si l’on n’est pas un initié. « Là où les jeux actuels ont beaucoup de contextualisation, de prise en main, de temps mort et d’apprentissage, les jeux d’arcade avaient un côté immédiat, instantané », souligne le youtubeur Benzaie. A l’époque, la prise en main du jeu était souvent induite par le design. Par exemple, on sait directement grâce à leur forme qu’il faut sauter sur les champignons de Mario et pas leur rentrer dedans. » En réponse à ces attentes, des rééditions « à l’ancienne » ont vu le jour notamment du côté des MMO avec World of Warcraft classic ou encore DOFUS retro.

Explorer le passé du jeu vidéo, c'est aussi se cultiver

Pour Patrick Hellio, « revenir à des gameplays essentiels, c’est aussi aller à la quintessence du jeu vidéo qui a aujourd’hui une véritable histoire. Cela permet de comprendre comment le jeu vidéo s’est construit à travers le temps ». « C’est comme un cinéphile fan de science-fiction. Il ne regarde pas seulement les nouvelles sorties mais il va aussi vouloir voir Metropolis de Fritzlang », compare le président de M05. Arthur, qui crie devant son écran parce que son Ryu se fait massacrer par Chun-Li, est donc également en train de se cultiver.

Le pixel art, ode aux années 1980

En France on pourrait dire que celui qui l’a fait connaître cet art est le street artiste Invader avec ses œuvres pixélisées faites en mosaïques sur les murs de Paris. « Dans le jeu vidéo, le pixel art, qui est à la base une limitation technique est devenu un choix artistique conscient, comme si on voulait tourner un film en noir et blanc, en pellicule, en basse résolution », expose Benzaie. « C’est un gros clin d’œil aux années 1980, presque du second degré. Un véritable exercice de style qui consiste à créer un jeu moderne avec une ergonomie et un gamedesign actuel, mais avec un visuel des années 1980, très pixélisé. » De belles réussites comme Shovel Knight ou Dead Cells qui répondent selon l’expert à la nostalgie des jeux réalisés par une petite équipe, « mais qui ont du cœur et créent une ambiance avec pas grand-chose ».