La vraie vie (pas) rêvée des espions
REALITE NON VIRTUELLE•Vous avez toujours rêver de devenir agent secret? Ok, c'est sans doute parce que vous souhaitez sauver le monde, mais peut-être aussi en raison de certaines névroses...Mireille Fournaise
Pourquoi le métier d’espion fait-il tant fantasmer? Animé d’un désir patriotique, les hommes et les femmes veulent servir leur nation… Faux. C’est simplement parce qu’on veut sauver le monde. Et éventuellement avoir une ceinture avec une corde de rappel intégrée, comme dans «GoldenEye».
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Now that I'm a grown up it's pretty fun to go back and play #goldeneye on a setting harder than agent. It's tough though, good to have some help. #nintendo #n64 #007
Ryan Graves
Ces aspects idéalisés de la profession, tout droit tirés de films et de séries, font en fait écho à certaines de nos tendances névrotiques, explique la psychanalyste Sandrine Vialle-Lenoël. «Il y a d’abord l’idée du sauveur: qui n’a jamais rêvé de sauver quelqu’un, d’être là au bon moment? Il y a aussi la jouissance du secret. On agit dans l’ombre, sans rien dire à ses proches et on connaît des choses que les autres ne savent pas, ce qui peut donner le sentiment d’être l’élu.» Ça, c’est pour les névroses plutôt positives, mais il y a également celles moins avouables…
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«Nous avons tous des tendances paranoïaques, souvent légères. Comme par exemple lorsque l’on ne trouve pas ses clefs et que l’on pense directement qu’on nous les a volées. Dans la vraie vie, la paranoïa est une pathologie, alors que pour un espion c’est une qualité. Il doit se méfier des autres, car il peut être démasqué à tout moment. C’est en ça que c’est attirant», résume la psychosociologue.
Envie de torture et de meurtre
Elle ajoute que dans certains cas, le métier, tel qu’on l’imagine, renvoie à une pulsion meurtrière ou à un côté pervers, dans le sens où l’espion doit tuer et torturer pour le bien commun. La transgression est acceptée et acceptable. Si le métier d’espion renvoie à nos tendances psychopathologiques, il nous permet aussi de les mettre à distance et de les canaliser en ne restant qu’un fantasme. «Le métier attire, mais peu de gens seraient capables de franchir le pas. Et puis un fantasme n’est pas fait pour être réalisé!», souligne Sandrine Vialle-Lenoël.
D’autant que certains risqueraient d’être assez déçus… Car si une vie clandestine, la possibilité de s’affranchir des lois, ou encore les gadgets, comme dans les films, nous font rêver, Bruno Fuligni, auteur de l’ouvrage «Le Livre des espions», rappelle que la réalité est beaucoup moins romanesque. «Les professionnels du renseignement sont des fonctionnaires d’Etat, soumis à une hiérarchie très stricte. Les officiers doivent être disciplinés, on n’admet pas trop qu’ils prennent des initiatives en dehors de leur mission. Ils doivent être ultras banals». Exit la musculature saillante et les voitures hors de prix.
Trahir son pays
A la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure), certains deviennent officiers de renseignement et font du terrain sous couverture, mais cela reste rare. La plupart ont pour mission de recruter des agents de renseignement dans d’autres pays pour en tirer des informations. Ces derniers sont de véritables espions, mais sachez que si vous le devenez un jour, cela signifie que des officiers étrangers vous auront démarché pour obtenir des renseignements sur la France. En somme, vous devrez «trahir votre pays», explique Rémi Kauffer, auteur du livre «Les Maîtres de l’espionnage».
« Le Bureau vient à vous ! Ce vendredi à 18h, rencontrez @erochant (showrunner) et Cécile Ducrocq (scénariste) au @Salondulivre de Paris pour une conférence exceptionnelle sur le #BureauDesLégendes... Infos : https://t.co/Bcg7h5ClKn…/scene-…/polar-vendredi-16-mars/ pic.twitter.com/psCSoQkaVb — Bureau des Légendes (@LBDL_canal) 15 mars 2018 »
Dans ce cas, ils ne vous tamponneront pas (recruter dans le jargon) sur votre envie d’aventure, mais sur des critères bien moins glamours, établis par la CIA: le Mice. «"M" pour money, car vous serez payé cher pour ce travail à risque (la prison si vous êtes pris). "I" pour idéologie. Il s’agit du cas où une personne est prête à trahir sa nation, car elle n’est pas d’accord avec son système politique par exemple. "C" pour chantage. Là, vous êtes victime et contraint par un service de renseignements qui détient des informations compromettantes sur vous. "E" pour égo. Une personne se sentant peu estimée dans sa vie va vouloir se venger ou flatter son égo d’une autre façon.»
Si vous vous rêviez en James Bond, devenez plutôt acteur. Sinon le site de la DGSE propose régulièrement des offres d’emplois. Vous pourrez peut-être devenir officier de renseignement, comme archiviste!