Ces espions qui ont changé le cours de l’histoire
HISTOIRE•Certains agents mythiques n'ont pas hésité à prendre des risques pour faire basculer l'histoire de leur pays...Christine Ludwig
Peu de gens connaissent leur existence, encore moins leur nom. Mais derrière les grands tournants politiques et diplomatiques se cachent parfois des espions qui ont œuvré dans l’ombre pendant des années. Des anecdotes secrètes d’espionnage, souvent révélées que quinze ou vingt ans plus tard.
La création même des services de renseignements en France démarre avec le parcours plein de rebondissements de Roger Wybot. Un nom d’emprunt que choisit le résistant Roger-Paul Warin en 1940, lorsqu’il commence à travailler en infiltré pour les services secrets du régime de Vichy. «Le colonel Passy lui demande alors de réorganiser le Bureau central de renseignements et d’action en Angleterre, le service de contre-espionnage sous De Gaulle», raconte explique Bruno Fuligni, historien et auteur de Dans les archives inédites des services secrets. Il y développe des techniques d’interrogatoire pour «dominer son adversaire» et crée des fichiers d’informations. «Il finira par créer la Direction de la surveillance du territoire (DST, l'actuelle DGSI, ndlr) en 1944 et en sera directeur jusqu’en 1959.»
Vengeance contre l’URSS
Mais l’une des plus importantes affaires d’espionnage du XXe siècle repose sur une simple histoire d’ego et de vengeance. Placardisé à Paris par le KGB, l’espion Farewell, de son vrai nom Vladimir Vetrov, végète dans ses bureaux. Frustré, il profite d’un voyage avec son beau-frère à Moscou et écrit un courrier anodin à Jacques Prévost, un ami qui collabore avec la DST.
«C’était un courrier crypté bien sûr, et Prevost s’en est tout de suite douté. Il le met en lien avec la DST, à qui Vladimir Vetrov décide d’envoyer des documents extrêmement confidentiels», explique Bruno Fuligni. Furieux d’avoir été mis de côté par le KGB, l’espion décide de faire tomber l’URSS. François Mitterrand décide de mettre Vetrov en relation avec les Etats-Unis. «Ronald Reagan aura alors lui-même accès à ces fichiers qui illustrent la faiblesse de l’URSS sur le plan technique. Les Etats-Unis pousseront l’Union Soviétique à se ruiner et elle tombera quelques années plus tard.» Vetrov, lui, sera exécuté en 1985 après avoir fourni plus de 3.000 pages de documents.
Des partitions musicales cryptées
Certains espions importants de ces dernières années étaient déjà bien connus du grand public. Comme la chanteuse et danseuse Joséphine Baker qui s’est engagée au début de la Seconde guerre mondiale. Devenue agent du contre-espionnage, elle prend part à d’importantes missions secrètes. Josephine Baker a notamment utilisé des partitions musicales pour dissimuler des messages codés. «Son rôle a été décisif pendant la résistance. Cet aspect de sa personnalité la rend encore plus intéressante. On a une toute autre image de l’artiste», souligne Eric Landraf, commissaire technique de l’exposition Secret d’Etat.
«Connus ou non, il faut savoir que les espions existent depuis toujours. Ce sont des gens qui gravitent autour des décideurs pour assurer un rôle de surveillance et de protection. Il y en avait déjà auprès des gouverneurs de province dans l’empire romain», précise-t-il. Avec autant d’histoires, parfois encore secrètes, qui ont façonné l’histoire.