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A la rencontre de Laura, 16 ans et apprentie driveuse

A la rencontre de Laura, 16 ans et apprentie driveuse

PortraitDéterminée et amoureuse des chevaux, à tout juste 16 ans Laura Soumille se lance sur la piste au grand trot…
Louise Gully

Louise Gully

A 7h30, alors que certains prennent le bus pour se rendre en cours de SVT, Laura a choisi le chemin des écuries. Originaire du sud du pays, elle suit actuellement une formation pour devenir une as du sulky. Pour apprendre son futur métier, l’apprentie driver dispose du top du top: les 430 hectares du domaine de Grosbois, à Boissy-Saint-Léger en région Île-de-France. «Après un collège général, j’ai intégrée l’AFASEC (Association pour la formation et l’action sociale des écuries de courses) de Cabriès (PACA) avant de réaliser ma deuxième et troisième année à l’école de Grosbois, la meilleure pour le trot», raconte la jeune apprentie alors qu’elle nettoie le boxe d’un cheval.

Laura en train de nettoyer le boxe d'un cheval.


Une formation en alternance

L’école des jockeys et drivers propose aux jeunes, à partir de 14 ans, une formation en alternance: «Je passe deux semaines à l’école et deux semaines dans une écurie, dans la Sartre, près du Mans», illustre Laura. Comme elle, ce matin-là et comme tous les jours de la semaine, les 21 autres élèves de sa classe enlèvent les crottins des boxes. «Le travail des trotteurs a lieu le lundi et le jeudi. Les autres jours de la semaine, on va les promener», explique l’apprentie driver. Ensuite, tous retournent près de l’internat pour leurs cours théoriques. «On a de l’anglais, des mathématiques, de la comptabilité, mais aussi des leçons plus spécifiques comme gestion des prairies et hippologie (étude de l’alimentation, du comportement et de l’anatomie du cheval).»

La driveuse met des protections à Volto.

Alors qu’elle prépare Volto, son cheval préféré, Laura nous parle de son parcours: «Je fais du sulky depuis toute petite. Mon père, coureur amateur de trot, m’a transmis sa passion. J’adore ça et je ne me vois pas faire autre chose.» Une vocation de toujours, mais surtout une envie de prouver que le monde des courses n’est pas uniquement réservé aux hommes: «Je veux montrer que les femmes peuvent devenir de grandes driveuses et même de grandes entraîneuses. Je veux devenir Jean-Michel Bazire (un des meilleurs drivers au monde), mais en femme», affirme-t-elle. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: aujourd’hui 32% des salariés des écuries de course sont des femmes, un taux qui a doublé entre 2004 et 2013. Elles restent malgré tout sous représentées parmi les drivers professionnels.

«On travaille 35 heures en trois jours»

Un état de fait loin d’affecter Laura. Son «mental de gagnante», aux dires de ses deux formateurs, lui a permis de remporter la "course école" du mois d’octobre, une compétition réservée aux apprentis alternants afin de les préparer aux événements officiels. Mais avant d’en arriver là, l’adolescente a dû faire preuve de patience: «Dans ce milieu, c’est parfois dur, il faut s’accrocher. On travaille 35 heures en trois jours. Quand je suis à l’écurie de mon patron, j’entraine cinq chevaux chaque matin. Ici, je n’en ai qu’un, ça me laisse plus de temps pour lui faire ses soins.» En tout, Laura s’occupera de Volto pendant deux heures. Mais avant de se diriger vers les pistes d’entrainement, les formateurs, tous deux anciens coureurs, effectuent un petit briefing: «Ne laissez pas glisser», lancent-ils aux apprentis déjà casqués et chronomètres en main. Concrètement, cela veut dire «maintenez l’allure, ne vous laissez pas emporter par votre cheval».

Laura et Volto sur la piste.

Ce jour là, d’autres drivers courent sur la piste, un véritable va et vient qui donne le tournis. Tous à la queuleuleu, les jeunes pilotes commencent par effectuer trois tours au petit trot avant de s’élancer à toute allure sur les trois derniers tours. Ce matin là, Laura et Volto ont d’ailleurs croisé Jean-Michel Bazire en plein entrainement.

La classe d'apprentis drivers à l'entrainement.

«J’ai failli me prendre un tracteur»

Après avoir fait marcher son cheval quelques instants pour qu’il récupère, Laura fonce à la douche et en profite pour me faire un compte-rendu: «Volto était très bien, sauf à un moment où je n’arrivais plus à le diriger et j’ai failli me prendre un tracteur qui damait la piste.» Après une douche à l’eau tiède et quelques minutes à sécher sous les rayons infrarouges, l’hongre de 8 ans retournera dans son boxe avec deux couvertures sur le dos avant de partir en balade le lendemain matin.

Volto, sous ses deux couvertures.

Quant à Laura, à 16 ans et loin de sa famille, elle semble avoir un mental d’acier pour se lancer dans la course. La directrice de l’école des drivers, Florence Pierret, est d’ailleurs optimiste: «6 mois après leur sortie d’école, 90% de nos élèves ont un emploi.» Si tous ne seront pas driver, «il y a toujours du travail dans les écuries», ajoute-t-elle. Certains apprentis deviendront lad driver, entraîneur ou encore garçon de voyage pour accompagner les chevaux dans leurs déplacements et ainsi vivre leur passion au quotidien.


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