ma vie écocoL'Amap, un premier pas vers la «consom'action»

L'Amap, un premier pas vers la «consom'action»

ma vie écocoNotre rédactrice 100% économie collaborative, pro-circuit-court, raconte sa nouvelle vie dans une Amap…
Adèle Bertier

Adèle Bertier

Voilà presque un mois que je n’ai pas mis les pieds dans le supermarché en bas de chez moi. Dorénavant, c’est dans un supermarché coopératif et dans l’Amap (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) de mon quartier, que je récupère tous les jeudis soir mon panier de légumes bio et de saison. Partage avec les gens du quartier, solidarité avec les producteurs, et qualité de la marchandise... Malgré quelques inconvénients, mon expérience 100% économie collaborative m’a convaincu des bienfaits de l’Amap.

«  Comment rejoindre une #amap? les détails sur le site du #reseauamap #agricultureurbaine #bio #food #mieuxmanger #ShareParis2017 #MBADMB pic.twitter.com/KKnosc6sQS — Catalina Hritcu (@catalina_hritcu) 24 septembre 2017 »




«Je n’ai pas encore réussi à me payer»

Je débarque dans le local de l’Amap Coup de pousse, dans le 19e arrondissement de Paris, à 19h30, ce jeudi. Le trésorier de l'association m’accueille pendant que Xavier, le maraîcher de Sancy-les-Provins (77), commence à décharger son camion. Environ 70 foyers ont rendez-vous avec leurs légumes bio. Avant tout, je paie une cotisation de 16€ à l’association, et je signe 4 chèques de 45,50€, prix de mon engagement dans l’Amap jusqu’au mois de décembre. Le demi-panier de légumes me revient ainsi à environ 11€.

J’ai la sensation de faire un geste «militant» en signant ces chèques. Car il ne s’agit pas uniquement de récupérer des paniers sans se prendre la tête sur le choix des légumes, mais aussi de soutenir Xavier, maraîcher depuis deux ans seulement.

En travaillant avec trois Amap d’Ile-de-France, il bénéficie d’une visibilité financière qui lui permet d’envisager l’avenir sereinement. «Pour atteindre l’équilibre financier, il faudrait que je vende 115 parts par semaine, et selon mes prévisions, je vais finir avec 100 parts cette année. Ça progresse, mais pour l’instant, je n’ai pas encore réussi à me payer», m’explique-t-il. Une situation qui touche beaucoup de producteurs, et qui ne risque pas de s'améliorer avec la décision de l’Etat français de ne plus verser les aides au maintien des agriculteurs biologiques à partir de 2018.

Savoir mettre la main à la pâte

Côté consommateur, faire partie d’une Amap implique non seulement d’être à l’heure chaque jeudi pour récupérer ses légumes, mais aussi de participer aux distributions à tour de rôle. C’est parti pour un sympathique retour en enfance, avec le jeu de la marchande… Je dois décharger les caisses de légumes que j’installe dans la salle, sortir les balances pour peser les produits et servir les «amapiens» en fonction de la taille de leur panier. Je me fie pour ça aux quantités indiquées par Xavier sur le tableau.

A droite, Xavier, le maraîcher de l'Amap "Coup de pousse", prépare son panier de légumes, comme les autres membres de l'association. Crédit: A. Bertier/20 Minutes

A 20h, c’est le rush, et mieux vaut être réactif. Pas facile d’empêcher les plus pressés de se servir eux-mêmes, mais j’accroche l’attention en glissant quelques idées de recettes avec la courge «pomme d’or» et le basilic thaïlandais qui laissent tout le monde perplexe.

Le producteur, qui a motivé sa famille à s’inscrire dans l’Amap, se mêle à la queue pour récupérer le panier de sa mère. «Pas eu le temps de le faire avant», indique ce travailleur acharné qui dit travailler «70h par semaine» entre la gestion de son exploitation de 4 ha et les distributions. D’autres volontaires installent l’apéro au comptoir, où chacun est invité à boire un verre après la récolte. J’aurais bien mérité quelques gorgées de bière artisanale après trois quart d’heure de distribution de carottes fraîchement sorties de terre…

L’hiver est rude

Panier particulièrement fourni ce jeudi. Quand on fait la distribution, on emporte le rab de légumes. Crédit: A. Bertier/20 Minutes


A 20h30 passé, une retardataire est accueillie par le maraîcher désolé. Après l’heure, ce n’est plus l’heure… Cette amapienne devra se passer de navets et de carottes et se rabattre sur davantage d’aubergines et de poivrons. Le genre de petits déboires qui ne surprend pas l’Amap. Il faut dire que Xavier doit faire preuve d’un véritable numéro d’équilibriste pour gérer les stocks. «Par exemple, pendant 4 mois d’hiver, j’ai vraiment la pression. C’est très désagréable de livrer de tout petits paniers», me confie Xavier.

Olivier, membre de l’Amap depuis deux ans, voit régulièrement les gens regarder amèrement leurs légumes en décembre. «On est prévenus quand on intègre l’association. C’est évident que la récolte est plus petite l’hiver que l’été. Mais sur l’année, l’abondance de certains paniers compense les petites pénuries» Pour l’instant, je ne suis pas encore morte de faim. C’est même mon jour de chance: les «amapiens» qui gèrent la distribution ont le privilège de repartir avec le rab. Heureusement que j’ai appris à ne pas gâcher mon panier…