PortraitLes fixeurs, James Bond du cinéma

Les fixeurs, James Bond du cinéma

PortraitFixeur n'est pas un métier anodin, au cinéma cela tourne à la mission (jamais) impossible...
Aliénor Manet

Aliénor Manet

Sans eux, beaucoup de films n’auraient jamais vu le jour. Les fixeurs font les repérages pour les lieux de tournage, obtiennent les autorisations, font les traductions, réservent les meilleurs endroits pour loger les équipes. Dans la production cinématographique, le métier est peu connu et pourtant indispensable aux producteurs.

Le must: avoir un bon réseau local


Contacté par la maison de production pour préparer le tournage, le fixeur est un couteau suisse ambulant. Il parle plusieurs langues, a un important réseau dans sa région. Plus que tout, «il doit être débrouillard, savoir se sortir de toutes les situations, appuie Rémi Morawski, propriétaire d’Emerge Film Solutions le plus large réseau de fixeurs au monde. Il doit être capable de lire un synopsis et de donner des idées créatives pour l’enrichir, comprendre les attentes du client et la culture dans laquelle il travaille.»

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Tel un agent secret du cinéma, il doit savoir «quand agir selon les règles, et quand suivre son instinct et passer par des chemins détournés pour parvenir à ses fins». En bref, le fixeur est un James Bond de la production de films -sans «le permis de tuer», bien sûr.

Dans des villes comme Londres, l’exercice de la profession est moins extrême mais pas moins complexe. «Il faut pouvoir respecter un budget tout en trouvant des solutions à des demandes parfois étranges», explique Gussie Peile, cheffe du département Production de Riverfilm, basée dans la capitale britannique. Essayez de fermer une rue du centre de Londres ou de trouver un lieu où tourner avec en arrière-plan le Big Ben, et vous comprendrez.

Connaître son terrain de travail

A quelques 1.900 kilomètres au nord-ouest de là, le 007 de la production prend un visage plus sauvage. Bui Baldvinsson gère la plateforme créée par les fixeurs islandais pour se différencier des agences de voyages, qui tentent parfois de marcher sur leurs plates-bandes. «Ici, être fixeur implique de très bien connaître la nature islandaise, quels endroits éviter, en quelle période. Certaines régions peuvent devenir périlleuses, indique Bui Balvinsson. Tout le monde se connaît ici. Il faut donc savoir à qui s’adresser pour obtenir les meilleurs affaires.»

Les températures extrêmes de l'hiver islandais peuvent rendre difficiles les tournages. Bui Baldvinsson

L’étymologie du mot fixer en anglais veut dire «ceux qui réparent», et ce n’est pas un hasard. Rémi Morawski, décrit justement: «Il y a quelques années, sur un projet de documentaire au Sahel, un photographe a eu la bonne idée d’aller, pendant la nuit, prendre des photos dans une zone militaire interdite d’accès. Heureusement que notre fixeur avait de la famille dans la police locale, il a pu être libéré.»

Une activité fluctuente

Alors comment devient-on fixeur? «Ils tombent souvent là-dedans par hasard, au croisement avec leur profession», explique Rémi Morawski. Il existe des formations pour apprendre les bases, notamment dans les écoles de cinéma, mais la plupart du métier dépend de son réseau et de ses capacités à se débrouiller. Par contre, il reste difficile de faire cela à temps plein. Le fixeur est dépendant des sociétés de production et des tournages qui décident de se faire dans sa zone. Il alterne donc entre périodes de calme plat et de forte activité.

Les fixeurs sont sûrement les agents secrets les moins chers du marché. Pour s’offrir leurs services, en moyenne, il faut compter 200 à 300€ par jour. Au pays des agents très spéciaux, la concurrence est rude.