A quand remonte le dernier caprice d’un acteur français? Cela étonnera sûrement mais c’est Catherine Frot, la dernière à s’être faite attaquer par un réalisateur, pour avoir demandé 1 million€ pour jouer dans Associés contre le crime… (2012). Et c’était il y a trois ans. Depuis, les stars du cinéma français ont peu fait parler d’elles. Et pour cause, l’air du temps ne sont pas à leur avantage.

Moins de caprices

En janvier 2015, le Centre national du cinéma (CNC) a limité les salaires des professionnels du cinéma. Les subventions -qui sont très importantes en France- ne sont plus données à ceux qui se montrent trop gourmands.

A cela s’ajoute le moindre succès des films français, comparés à leurs homologues américains. «La fréquentation des films français diminue de 21,5 % en 2015 pour atteindre 72,56 millions d'entrées, soit un niveau inférieur à la moyenne des dix dernières années (78,53 millions)», indique dans un rapport le CNC.

>>> Retrouvez tout notre dossier «Côté coulisses», en partenariat avec Universal et le film «Ave César» réalisé par les frères Coen, en salle le 17 février.

Les acteurs et actrices françaises sont donc obligés de revoir leurs exigences à la baisse. «On voit moins de caprices sur les plateaux, raconte Vincent Michaud, producteur chez 2017 Films. Avant, on pouvait voir des stars se disputer pour obtenir la meilleure loge, le meilleur fauteuil, avoir plus de jours de tournage que leurs coéquipiers. Actuellement, les acteurs sont toujours exigeants mais leurs demandes sont moins faramineuses.»

Un public moins intéressé par les acteurs

Boris Vassalo, producteur à HvH Films s’accorde là-dessus. Il vient de finir de tourner le teaser de la nouvelle série de Netflix, Marseille, avec, entre autres, Gérard Depardieu et Benoît Magimel. «Les comédiens restent exigeants, mais pour moi, ce ne sont plus des caprices. Cela paraît normal que des acteurs comme Depardieu, qui vont apporter beaucoup de visibilité au film, puissent avoir certaines exigences sur le choix de leur logement ou de leur nourriture. Il n’y a plus rien d’exubérant.»

«Marseille», la nouvelle série de Netflix, illustre les luttes politiciennes de deux hommes dans les méandres de la cité méditerranéenne. Netflix / David Koskas

Cette accalmie s’accompagne d’un changement du comportement des spectateurs. «Les gens ne vont plus au cinéma pour voir des acteurs, comme c’était le cas pour Jean-Paul Belmondo ou Alain Delon, continue le producteur. Ils sont attirés par l’histoire que raconte le film.»

L’historien du cinéma Patrick Brion appuie ce propos: «Le succès grandissant du film d’animation et la généralisation des effets spéciaux mettent au second plan les acteurs, même s’ils continuent à se faire payer très cher. De manière générale, nous sommes beaucoup moins dans un cinéma de stars.» Il avance l’exemple des sagas fantastiques pour lesquelles «le public ne connaît ni le nom des acteurs, ni celui des réalisateurs qui souvent sont interchangeables».

Des réalisateurs plus puissants

La manière de financer les films a elle aussi changé. Les réalisateurs doivent de plus en plus mettre la main au portefeuille ou du moins participer à la recherche de financements. Ils y gagnent au change.

«Maintenant qu’ils interviennent dans la partie économique des films, les metteurs en scène sont plus tranquilles, ils ont plus de pouvoir vis-à-vis des producteurs, analyse Patrick Brion. On n’est plus à l’époque où les grands studios avaient sous contrat un vivier de réalisateurs et d’acteurs, payés à la semaine et qui leur obéissaient.»

Les stars françaises du grand écran n’ont pas pour autant perdu toutes leurs exigences. La série Dix pour cent diffusée sur France 2, retrace ainsi (de manière parfois exagérée) les caprices des stars à travers le regard de leurs agents artistiques. Il est clair que toutes ne sont pas prêtes de descendre de leur piédestal. Leur portefeuille est juste un peu plus léger.