L’eau, une ressource qui pose encore problème au Sénégal
•Petunia James
FOCUS - Au Sénégal, l’accès à l’eau est encore et toujours une préoccupation majeure à laquelle les organisations humanitaires doivent faire face.
Le droit à l’alimentation pour lequel le Secours catholique - Caritas France se bat est en prise directe avec la capacité de production agricole. Mais pour un meilleur rendement des cultures qui aboutirait à des conditions de vie plus favorables aux sénégalais, encore faut-il en avoir les moyens. Hormis l’aspect financier qu’il faut souvent engager, l’accès à l’eau douce apparaît comme déterminant.
Un point vital
«Je cultive des légumes essentiellement pour la consommation de mon ménage. Nous devons manger pour vivre avant de manger pour vendre. Ma priorité c’est nourrir ma famille. Et l’eau est le premier facteur de mise en place de parcelles maraîchères. S’il n’y avait pas de puits, personne ne pourrait cultiver ses terres», explique Aissatou Diarra, agricultrice dans le village de Keur Mama Lamine. Certains sont encore obligés d’avoir recours à des ceanes, des puits traditionnels sans ciment peu profonds, souvent victimes d’éboulement dès le lendemain de leur construction. «Grâce à Caritas, nous avons désormais des puits modernes hydrauliques qui nous aident dans nos activités agricoles», poursuit la paysanne.
Aujourd’hui, 300 000 personnes bénéficient d’un accès à l’eau grâce à une cinquantaine de forages réalisés par Caritas, et cofinancés par les populations locales. En effet, l’institution souhaite avant tout responsabiliser les sénégalais en les accompagnants et non en prenant tout en main. «En 2015, 82% de la population devrait avoir accès à l’eau», précise Boucar Diouf, responsable du développement rural Caritas dans la région de Kaolack.
Une ressource fragile
Outre les problèmes d’accession, l’eau fait aussi l’objet d’une inquiétude quant à sa qualité. «Nous devons lutter contre la salinisation des terres qui n’est, entre autre, pas favorable au maraîchage et à l’agriculture fruitière. L’eau de mer a tendance à s’infiltrer et à polluer les nappes phréatiques. Pour contrer cela, nous avons contribué à la création de digues anti sel et de barrages», raconte Gilbert Sène, chargé de programme développement rural Caritas.
Près du village de Santhie Béra, un barrage a donc permis de créer une réserve d’eau douce pareille à un grand bassin de récupération d’eau de pluie. Il favorise ainsi le développement des activités agricoles. «Avant sa création, il fallait creuser jusqu’à 7m pour faire un puits d’eau douce, aujourd’hui c’est entre 1 et 4m. Il sert également à développer la pisciculture de carpe Tilapia», ajoute Gilbert Sène.
Contrôler la gestion de l’eau
Bien public, l’eau doit pourtant être fournie de façon pérenne et sans altération de sa qualité. Pour ce faire, il existe des Associations des usagers de forage (Asufor). «Ces associations, réunies sous une fédération, sont indispensables pour la gestion des forages que l’on a pu mettre en place au Sénégal», explique Boucar Diouf.
«Notre forage a été réalisé en 1984 grâce au concours financier de Caritas et du Secours catholique. En 1995, il a été complété par un château d’eau à double réservoir d’une capacité de 254m3 qui alimente huit villages», intervient Arona Ndiaye, secrétaire général de l’Asufor du village Ngodiba. Cela permet d’approvisionner quelques 570 points d’eau dont 290 branchements privés, 14 publics et 250 sites de maraîchage.
«L’eau est vendue au compteur, 200 francs CFA (0,30€) le mètre cube», poursuit Arona Ndiaye. Un montant fixé à la suite d’assemblées où les populations locales sont réunies pour décider des meilleures façons de gérer les ressources hydriques. De l’investissement de chacun dépend ainsi la préservation de cet élément capital à l’avenir des sénégalais.