Le champion Sébastien Ogier vient en rookie aux 24 Heures du Mans
COURSE D'ENDURANCE•Ils ont 21 ans, lui 38 et 8 couronnes de champion du monde des rallyes. Portrait du trio de pilotes de l’écurie Richard Mille, formé de Sébastien Ogier, Charles Milesi et Lilou WadouxL. G.
Tous les trois nous promettent « de l’action » au Mans. L’un est expérimenté sur les circuits d’endurance, les deux autres novices. Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas la super star des rallyes Sébastien Ogier qui est le plus serein. « On ne se connaît que depuis quelques mois et on arrive de trois univers assez différents. Pour moi qui viens du rallye, je découvre le monde du circuit d’endurance. Aujourd’hui, je me lance un nouveau défi », nous raconte celui qui compte à son actif huit titres de champion du monde des rallyes automobiles.
Lui est un autodidacte. Quant à ses coéquipiers, Charles Milesi, fils de pilote et biberonné au mini-karting dès ses 8 ans, affiche déjà un beau palmarès : l'an dernier, il a remporté le championnat du monde d'endurance en LMP2 avec W Racing Team. Lilou Wadoux, elle, a découvert le bitume plus tardivement, 14 ans. Cela ne l'a pas empêchée de passer d'un volant à l'autre avec autant de vitesse que d'aisance. La Picarde, qui sera la plus jeune pilote tricolore à jamais prendre le départ des 24H du Mans, a même remporté l'une des courses d'ouverture de l'épreuve mancelle en 2021. Au côté de ces deux jeunes talents, rompus aux boucles comme à l'asphalte, Sébastien Ogier a donc dû troquer sa casquette d'expert pour celle d’apprenant : « Sur l’aspect technique, il est certain que c’est Charles qui a le plus de compétences. Mais de manière générale, on échange beaucoup entre nous », confie-t-il.
Une première pour le champion des rallyes
Les deux hommes et Lilou Wadoux ont rejoint l’écurie Richard Mille et se préparent donc désormais aux 24 Heures du Mans, où ils sont engagés dans la catégorie LMP2 (sport-prototypes). Une course mythique à laquelle seul Charles Milesi a déjà participé et où il s'est même imposé l'an dernier : « Le Mans est LA course. Elle mélange parcours urbain et virages rapides, mais peut aussi être assez cruelle car on a déjà vu des pilotes abandonner au tour final. C’est également cela qui fait son charme : tout peut basculer à la dernière minute », explique le jeune homme de 21 ans. Ses deux coéquipiers entendent donc « progresser le plus vite possible » et parlent d’un « énorme défi à relever sur le plan physique ».
Ce trio unique en son genre a beau se différencier sur bien des points, il entend jouer la carte de la complémentarité : « On utilise l’expérience des uns et des autres », résume Sébastien Ogier. Pour lui, c’est aussi tout un nouvel univers qu’il faut apprivoiser : « C’est comme entre le foot et le rugby, tu joues avec un ballon mais ce n’est pas du tout le même. Le style de pilotage est différent et cela nécessite une grosse remise en question », avoue-t-il.
A 38 ans comme à 21, l’environnement en ligne de mire
En tout cas, une chose est sûre pour les trois pilotes : la discipline évolue. « En une quinzaine d’années, j’ai eu le temps de voir pas mal de choses changer en matière d’environnement », relève Sébastien Ogier, qui rappelle que le monde de l’automobile est « un laboratoire de développement » et que « la tendance tend vers l’hybride et l’hydrogène ». La star des circuits reste malgré tout lucide : « Il y a encore une marge de progression importante. » Dans le monde des bolides comme ailleurs, « on voit que ça avance, mais malheureusement tous les pays ne jouent pas le jeu », ajoute Lilou Wadoux.
Une avancée qui se fait aussi ressentir dans le domaine de la parité. Cette année au Mans deux équipes mixtes s’affronteront en effet dans cette catégorie LMP2. Celle de Lilou Wadoux donc, mais aussi la team de la pilote allemande Sophia Floersch. En tout, cinq femmes participeront à la course (sur un total de 62 voitures) et un seul équipage sera composé entièrement de femmes.
Ogier se voit bien durer en endurance
Un message fort envoyé à un univers encore très masculin, mais qui ne représente pas une nouveauté en soi : « L’écurie Richard Mille avait déjà fait concourir un équipage 100% féminin. Depuis l’année dernière, il y a une volonté d’accueillir plus de filles en sport automobile », constate Fabrice Marinoni, réalisateur pour l’émission Champions d’Exception d’un reportage sur Frédéric Sausset, le premier pilote quadri amputé à avoir participé aux 24 Heures du Mans. Quant à Sébastien Ogier, pour le fin connaisseur, il n’y a aucun doute : « Il veut désormais faire des courses d’endurance. Il effectue une saison dans cette écurie avant d’espérer retourner chez Toyota. Il s’agit d’une année d’apprentissage. » A la dure. Le 18 mars, l'équipage fraîchement composé a bouclé les 1.000 Miles (environ 1.600km) de Sébring à la 15e position. Un bon indicateur du travail qu'il reste à accomplir d'ici au 11 juin.