Lyon : Procès d’une « lanceuse d’alerte » poursuivie par Tefal
JUSTICE•Cette inspectrice du travail avait été condamnée mais le verdict a été annulé en vertu de la loi Sapin II20 Minutes avec AFP
«Je n’ai fait que mon métier », a assuré jeudi à Lyon une inspectrice du travail de Haute-Savoie, jugée une troisième fois pour avoir rendu publics des documents confidentiels de la société Tefal. « J’estime qu’il y a des principes importants à défendre », a soutenu à la barre Laura Pfeiffer, dont le procès se tenait à l’aune de la nouvelle loi Sapin II sur les lanceurs d’alerte.
Ce statut est revendiqué par la jeune femme, qui a été accueillie devant la Cour d’appel de Lyon par les vivats de 250 personnes rassemblées par une intersyndicale de l’inspection du travail. Accusée de « recel de violation du secret des correspondances et violation du secret professionnel », la fonctionnaire avait été condamnée en première instance à Chambéry en décembre 2015 puis en appel en novembre 2016 à des peines d’amende avec sursis. Mais sa peine a été annulée en octobre dernier par la Cour de cassation, qui a demandé que l’affaire soit rejugée sur la base de la loi Sapin II.
Tefal accusé de collusion
A l’origine de l’affaire, un ancien informaticien de Tefal – également condamné mais qui n’a pas fait de recours – avait intercepté en 2013 une série de courriels et de fichiers de sa direction à l’usine Tefal de Rumilly (Haute-Savoie), où il travaillait. Il les avait ensuite envoyés anonymement par mail à Laura Pfeiffer, qui avait mené une mission dans la société.
Les documents peuvent attester d’une collusion entre Tefal et le supérieur hiérarchique de Laura Pfeiffer en vue d’entraver l’action de cette dernière, qui venait de demander la renégociation de l’accord 35 heures de l’entreprise. « Ca m’a sidéré, ça m’a créé un choc. (…) Je n’imaginais pas autant de manoeuvres aussi bien pensées et avec autant d’acteurs du département pour m’évincer », a raconté au président Eric Seguy la fonctionnaire, assurant n’avoir « jamais eu de souci avec (s) a hiérarchie » dans ses fonctions précédentes.
Des « fantasmes », selon Tefal
Après s’être tournée en vain vers une de ses supérieures Laura Pfeiffer avait saisi le conseil national de l’inspection du travail (CNIT) et les syndicats de son ministère, à qui elle avait transmis tous les fichiers. « Rien n’est constitué, ce sont des fantasmes, on voit des complots partout », a plaidé l’avocat de Tefal, Me Joseph Aguera.
« Je vois une fonctionnaire passionnée par son travail, qui a cru bien faire (..) Il faut que ça s’arrête », a déclaré pour sa part un des avocats de Laura Pfeiffer Me Henri Leclerc, en demandant la relaxe totale. L’avocat général a quant à lui demandé la confirmation de la condamnation du premier appel. La cour a mis en délibéré sa décision au 24 octobre prochain.