Usine amiantée : Qu’est ce que cela a changé pour les salariés de Renault Trucks à Vénissieux ?
SANTÉ AU TRAVAIL•Le site de Vénissieux a été reconnu officiellement comme « usine amiantée » fin 2016, après quinze ans de bataille…Elisa Frisullo
Au printemps 2016, après quinze longues années de batailles sociale et juridique, les Renault Trucks de Vénissieux obtenaient l’inscription de leur site sur la liste des établissements de fabrication, de flocage et de calorifugeage à l’amiante. Des lieux où en d’autres termes, ce matériau hautement toxique pour la santé était utilisé dans les process de fabrication. Le 25 octobre, la reconnaissance de la société vénissiane (ex RVI) comme «usine amiantée» était confirmée dans un arrêté publié au Journal officiel.
Trois mois plus tard, qu’est que cela a changé pour les employés et les anciens salariés qui ont travaillé sur le site entre 1964 et 1996, avant l’interdiction de l’amiante ? 20 Minutes fait le point sur ce dossier.
- De nombreux départs en préretraite possibles
Suite au classement en site amianté, les organisations syndicales de Renault Trucks sont entrées en négociation avec leur direction pour obtenir un accord sur les préretraites anticipées. Après plusieurs réunions, un accord a été signé début janvier, offrant ainsi aux employés concernés par l’amiante et à quelques années de la retraite de quitter l’entreprise plus tôt.
Potentiellement, 190 personnes pourraient ainsi partir en retraite anticipée dès fin mars. «D’ici 2036, 690 salariés du site sont concernés», indique Frederic Panetier, secrétaire général de la CGT Renault Trucks. Un site où travaillent actuellement plus de 4.000 personnes.
- Des recours pour faire valoir le préjudice d’anxiété
L’inscription de l’usine en site amianté ouvre la voie à de nombreux recours possibles pour les salariés et les anciens employés pour faire valoir le préjudice d’anxiété. Aujourd’hui, 150 dossiers ont déjà été déposés devant les Prud’hommes de Lyon, selon la CGT de Renault Trucks. «Entre 650 et 750 autres dossiers sont en cours de vérification», ajoute Jean-François Charoud, 64 ans, qui a passé 39 ans dans l’usine de Vénissieux.
Pour ce retraité comme pour bon nombre de salariés, le préjudice d’anxiété n’est pas un vain mot. «J’en ai perdu des copains qui sont morts d’un cancer de la plèvre. Alors forcément, quand on doit passer des examens on n'est jamais rassuré», confie ce délégué CGT, soucieux que toutes les personnes ayant travaillé à l’usine du temps de l’amiante soient informées de leurs droits.
- Plus de 10.000 salariés qui pourraient saisir la justice
Au-delà des nombreux cas déjà connus par la CGT, entre 10.000 et 15.000 ex-salariés de l’usine de Vénissieux pourraient faire valoir le préjudice d’anxiété devant la justice. «Tous ceux qui ont travaillé là entre 1964 et 1996, même trois ou six mois, sont concernés», ajoute Jean-François Charoud. Au terme de leur procédure devant les Prud’hommes, nombre d’entre eux devraient être indemnisés pour l’exposition à l’amiante qui leur a été imposée.
«Mais notre démarche va au-delà des indemnités. L’objectif est bien de faire prendre conscience à chacun qu’il ne faut pas faire n’importe quoi avec la santé des salariés. Il doit y avoir un principe de précaution. A l’époque c’était l’amiante, mais il y a aujourd’hui d’autres produits dont on connaît encore mal les effets sur la santé et qui pourraient se révéler tout aussi nocifs», ajoute Frédéric Panetier.