Lyon: En grève pour dénoncer les conditions d’accueil « indignes » réservées aux SDF
SOCIAL•Punaises, rats, saleté, manque de moyens... Les personnels d'un centre géré par le Foyer Notre-Dame-des-sans-Abri sont excédés...Elisa Frisullo
C’est la première fois depuis la création de l’établissement, il y a une soixantaine d’années, que le personnel fait grève. Signe, selon les travailleurs mobilisés, du « grand malaise » dans lequel ils se retrouvent plongés.
Ce mardi, les 17 salariés du centre Gabriel-Rosset, l’un des plus gros lieux d’accueil pour SDF de la métropole, situé dans le 7e arrondissement de et géré par le , sont entrés en grève illimitée pour dénoncer leurs conditions de travail, mais surtout l’accueil réservé au public hébergé.
« Les 191 personnes accueillies tous les soirs vivent dans des conditions totalement insalubres. Certaines sont logées entre 20 h 30 et 6 heures du matin seulement à une ou deux dans des cabines vétustes de 3 m2. Ceux en totale déchéance, avec lesquels personne ne veut dormir, se couchent dans le dortoir que l’on appelle la cave. L’hygiène y est déplorable », témoigne l’un des salariés mobilisés.
De la nourriture périmée
« Il y a des rats, des punaises de lits, des poux… L’odeur est insoutenable », ajoute l’une de ses collègues, qui déplore également la qualité des plats servis aux plus démunis. « Le pain est bien souvent rassi ou moisi, les produits périmés. Les sans-abri, que l’on pourrait imaginer loin de ces préoccupations-là, viennent nous dire qu’ils ne peuvent pas manger tellement c’est mauvais. »
A ces problèmes d’hygiène s’ajoute un manque important de personnels. « Nous sommes 17 pour gérer 191 personnes. Lundi soir, il y avait un éducateur et un agent d’accueil seulement pour s’occuper de tous les sans-abri, car les salariés en formation, en congé ou en arrêt maladie ne sont pas remplacés. Nous ne pouvons pas faire notre travail, c’est-à-dire de l’accompagnement social ou éducatif. Nous accompagnons juste ces gens dans leur déchéance », s’agace un employé du centre.
Un public difficile, du personnel insuffisant
Ce manque de présence humaine face à un public souvent alcoolisé ou marqué par des années de rue entraîne des violences. « Il y a des agressions physiques contre les employés mais également entre les usagers. Récemment une infirmière a été agressée sexuellement », confie un autre membre de l’équipe, qui réclame notamment davantage de moyens humains, la fermeture du dortoir insalubre, la réfection des douches et toilettes, et le nettoyage des sanitaires. « Nous nous battons juste pour que ces gens soient hébergés dans la dignité », résume une employée.
Face à leur mobilisation, la direction du Foyer Notre-Dame des Sans-Abri reconnaît des conditions d’accueil « difficiles » à Gabriel-Rosset. « Mais nous faisons beaucoup de choses pour entretenir et désinfecter les lieux », assure Marion Veziant Roland, directrice du Foyer. En novembre, les douches et l’infirmerie devraient être rénovées. En juin, le siège de l’association devrait déménager et libérer ainsi de nouveaux espaces pour, après de menus travaux, améliorer un peu les conditions d’accueil du public.
Un projet de rénovation à venir
« Mais pour revoir le projet social du centre, il faut que tous les partenaires se mettent autour de la table. Imaginer un vrai projet de réhabilitation nécessite des moyens », ajoute la responsable, qui prévoit le début de la rénovation des lieux pour 2017. « Mais je ne sais pas quand elle sera achevée ». Le centre est en effet financé pour moitié par le Foyer sur ses fonds propres (grâce aux dons essentiellement) et par l’Etat.
Or la situation financière de l’association est loin d’être florissante. « Nous avons enregistré en 2016 17 millions de ressources pour 19 millions de charges. Notre résultat net affichera en fin d’année un déficit de deux millions d’euros », précise la direction. L’embauche de personnel supplémentaire n’est donc pas à l’ordre du jour…