Lyon : Comment Eric Elmosnino vit «une connexion quasi miraculeuse» avec Garrincha
THEATRE•Eric Elmosnino sera à l’affiche des Nuits de Fourvière du 16 au 30 juin avec « Monsieur Armand dit Garrincha », à l’occasion de l’Euro de football en France. Le comédien s’est longuement confié à « 20 Minutes »…Propos recueillis par Jérémy Laugier
Tout seul sur scène, Eric Elmosnino a interprété une centaine de fois Monsieur Armand dit Garrincha. La pièce de théâtre consacrée à cet ancien footballeur brésilien maudit a été créée en 2001, aux côtés de Serge Valletti et Patrick Pineau. Quinze ans plus tard, à l’occasion de l’Euro, le comédien est programmé du 16 au 30 juin par les Nuits de Fourvière à Lyon. Il confie à 20 Minutes son lien fort avec ce spectacle et Garrincha.
Comment avez-vous été à l’origine de cette pièce dédiée à un footballeur brésilien ?
J’ai lu par hasard un article sur lui dans L’Equipe Magazine. Je ne le connaissais que de nom et en découvrant son portrait, j’ai presque eu la chair de poule. Il avait des malformations [colonne vertébrale et jambes] mais il est devenu l’un des plus grands joueurs de tous les temps en remportant les Coupes du monde 1958 et 1962. Et ce sans avoir la notoriété des Pelé, Cruyff et Maradona. C’est quelqu’un d’affilié au peuple qui a fini totalement brûlé par l’alcool à 49 ans. Je voulais faire quelque chose avec cette histoire. Patrick Pineau [metteur en scène] m’a conseillé d’en parler à Serge Valletti [auteur].
Qu’est-ce qui vous a le plus ému dans la vie de Garrincha ?
L’un de ses amis est venu le voir juste avant sa mort [en 1983]. Il était aveugle et sanglé sur son lit afin de ne plus vider les bouteilles d’alcool à 90 degrés. Son ami voulait emmener Garrincha jouer une dernière fois au foot. J’ai senti un vrai potentiel de dramaturgie possible.
Où placez-vous Garrincha dans la hiérarchie des meilleurs footballeurs de l’histoire ?
Il y a sûrement des plus grands joueurs que Garrincha, comme Messi. Mais ce qui est extraordinaire, c’est qu’il n’avait qu’un seul dribble. Tout le stade savait qu’il allait dribbler sur la droite. Et 70.000 personnes éclataient de rire à chaque fois comme s’ils venaient voir un clown. C’était un spectacle à lui tout seul.
De quelle manière Serge Valletti a-t-il intégré Garrincha dans sa narration ?
Il a livré une sorte de fantasmagorie en croisant son oncle, Monsieur Armand, qui est vraiment le premier buteur de l’histoire du stade Vélodrome, et Garrincha. Comme si leurs destins étaient liés. Il y a un parfum désuet dans ce spectacle qui parle d’une époque disparue. Cette nostalgie m’a plu et c’est pour moi l’un des textes les plus forts et les plus intimes de Serge.
« Monsieur Armand dit Garrincha » ne s’adresse donc pas qu’aux fans de foot ?
Non, il y a aussi de nombreuses histoires racontées par des types un peu mythos dans l’univers marseillais au cœur de ce spectacle parfois émouvant.
Pourquoi ressortez-vous cette création, quinze ans après à Fourvière ?
Deux années de suite, je suis venu à Lyon faire des lectures avec Serge Valletti qui avait traduit Aristophane. J’ai croisé Dominique Delorme [directeur des Nuits de Fourvière] et avec la perspective de l’Euro en France, il nous a proposé de venir faire ce spectacle sur Garrincha. On a dit banco !
Vous arrive-t-il de trouver assez dingue qu’un joueur plutôt méconnu du grand public soit devenu un héros vous tenant à cœur sur scène ?
C’est une connexion quasi miraculeuse. Des journalistes brésiliens étaient venus voir le spectacle à sa sortie au théâtre de l’Odéon (Paris). Ils étaient touchés et surpris du choix de Garrincha plutôt que de celui de Pelé. J’ai même été invité au Brésil pour le jouer.
Finalement, vous identifiez-vous davantage au rôle de Serge Gainsbourg au cinéma (2010) ou à celui de Garrincha sur scène ?
Gainsbourg était une opportunité qui ne se refusait pas. Je me suis bien amusé à le faire même si je me sentais éloigné du personnage au départ et qu’il s’agissait d’un biopic, donc un peu d’une figure imposée. Ce n’était pas le même chemin que pour Garrincha où j’étais à l’origine du spectacle.
De 20 à 27 euros. A 19 heures du 16 au 30 juin (relâche les 19, 22, 26 et 28 juin) sous le préau du collège Jean Moulin, 1 place des Minimes (Lyon 5e). Réservations ici.