Lyon: Après avoir fui l'Angola, un migrant devient coiffeur bénévole pour les réfugiés
PORTRAIT•Depuis son arrivée à Lyon il y a un an, Ezekiel, 25 ans, est aidé par le Secours catholique du Rhône...Elisa Frisullo
Son visage serein et son large sourire ne laissent rien filtrer de son douloureux passé et de ses longs mois de galère. A 25 ans, Ezekiel, jeune migrant Angolais arrivé à Lyon il y a un an, fait partie depuis peu du millier de bénévoles du Secours catholique du Rhône, mobilisé toute l’année pour venir en aide aux plus démunis.
Chaque jour ou presque, il coiffe des réfugiés venus chercher de l’écoute et de l’aide au centre Sésame Accueil Migrants de l’association, installé dans le 3e arrondissement de Lyon. Une mission que le jeune homme, qui a connu l’exil, la rue et la solitude, remplit avec sérieux et « fraternité ». « Même quand on est dans la difficulté, on a envie de se retrouver propre, coiffé. C’est important pour eux. Mais je ne fais pas que les coiffer, je les écoute et je les motive en leur disant qu’on peut y arriver », confie Ezekiel, qui a débarqué en France le 14 octobre 2014, après avoir fui l’Angola où il était menacé.
Son père porté disparu depuis 2010
« Je suis d’une famille de politiciens. Mes parents étaient engagés dans un mouvement pour l’indépendance. Mon père a disparu en 2010 et ma mère vit cachée. Je devais fuir, mais je n’aurais jamais pensé que je vivrais un jour en France », raconte le jeune coiffeur. Il passe alors par la République dominicaine du Congo, d’où il part pour la France « avec un faux passeport prêté » par une connaissance. Le jour de son arrivée à Paris, il descend jusqu’à Lyon en covoiturage sans savoir où la voiture le conduit.
Les journées et les nuits sont très difficiles. « Je ne parlais pas français, je ne comprenais rien. J’avais très froid et j’avais faim. Alors je me suis débrouillé pour demander de l’aide en portugais, langue que l’on parle en Angola », ajoute Ezekiel. C’est ainsi qu’il découvre l’accueil migrants du Secours catholique du Rhône. « J’y ai trouvé une très grande fraternité. Ils m’ont indiqué où me rendre pour être hébergé, pour manger. J’y ai appris le français », ajoute-t-il. « Il passait tout son temps chez nous », se souvient Pierre Keller, délégué de l’association dans le Rhône.
Son bac +2 en poche, il reprend les études à Lyon-II
Après avoir connu de nombreuses nuits dans la rue, et des appels répétés au 115 pour dormir au chaud, il a finalement été hébergé quelque temps au centre de transit de Villeurbanne, avant d’obtenir une place dans un Centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Sa demande d’asile déposée à son arrivée à Lyon lui a été refusée. Mais il a engagé un recours.
« Tant que je n’ai pas l’asile, je ne peux pas travailler. Mon rêve aujourd’hui, c’est d’avoir la protection de la France et de pouvoir vivre normalement », précise le jeune demandeur d’asile, qui en plus de son activité bénévole, s’est inscrit à l’université Lyon-II. Le jeune homme, déjà doté d’un bac +2, s’est inscrit en anthropologie portugaise. Mais dès l’an prochain, c’est en droit qu’il veut poursuivre ses études pour devenir avocat et défendre les plus démunis.