CocciClelia, bookstagrameuse et contributrice du groupe de lecture 20 Minutes Books, vous recommande « Ceci n’est pas un fait divers » de Philippe Besson, paru le 5 janvier 2023 aux Éditions Julliard.

Sa citation préférée :

« Promets-moi de… Juste après, sa tête a roulé, c’était fini… Et moi, je saurai jamais quelle promesse je dois tenir. » »

Pourquoi ce livre ?

• Parce que la réalité du féminicide ne s’arrête pas au corps sans vie d’une femme. Bien souvent il y a des victimes collatérales, dont on ne parle pas, et qui n’ont pas le droit à la parole. Il y a des enfants, parfois témoins du drame, qui doivent surmonter cette horreur et se reconstruire. C’est au travers des yeux d’un de ces enfants que l’auteur raconte les faits. Cette histoire est inspirée de faits réels.
• Parce que ce que l’on appelait de façon « romantique » autrefois sous l’appellation de « crime passionnel » doit être vu de façon bien plus réaliste. Ce crime est celui d’un propriétaire, un homme qui s’arroge le droit de vie et de mort sur une de ses propriétés, son épouse. Et pour que ce crime prenne réellement une dimension réaliste, il faut sortir du factuel, sortir de l’énoncé froid des chiffres, donner la parole aux victimes collatérales, montrer les liens brisés, les vies dévastées, il faut éveiller les consciences pour que ce crime soit effectivement reconnu.
• Parce que le féminicide, pour l’auteur, doit quitter la rubrique des faits divers, pour devenir un vrai fait de société, un fait politique. Cela nécessite que l’on regarde la réalité sans fards, sans voiles, que l’on permette aux survivants de parler, que l’on prenne des mesures réelles pour aider ces personnes dans leur reconstruction. Et pourquoi pas, ajouter cela au pretium doloris, puisque notre société doit valoriser chaque chose pour y donner une importance.
• Parce que ce livre relate parfaitement, aussi clairement qu’un rapport médico-légal, le drame, ses traumatismes, ses répercussions, et la tentative pour deux adolescents de se reconstruire après tout cela. Le style est fluide, mais sans fioritures, mais avec beaucoup de sensibilité, il va à l’essentiel, et chaque mot est pesé, un réel travail d’écriture qui permet au lecteur de presque « vivre » le drame, comme le narrateur et sa sœur.

L’essentiel en 2 minutes

L’intrigue. Un coup de téléphone, Léa appelle son frère pour lui annoncer : « Papa vient de tuer Maman ». Réunis tous les deux, ils vont vivre le traumatisme d’avoir perdu leur mère décédée sous les coups de leur père. L’enquête de police, les obsèques, le procès, les images et les mots impossibles à formuler.

Les personnages. Cécile Morand et Franck Malzieu, un couple marié depuis vingt ans, deux enfants Léa 13 ans et le narrateur dont on ne connaîtra jamais le nom, âgé de 19 ans. Franck un homme violent, jaloux, possessif, narcissique. Cécile une femme résignée sous les insultes et les coups, elle veut sauver ses enfants.

Les lieux. Blanquefort, petite ville de province en périphérie nord de Bordeaux. Loin de Bordeaux, de sa bourgeoisie, de son faste, mais également loin de l’importance économique des châteaux et propriétés viticoles de la région. Une petite ville ouvrière toute simple.

L’époque. L’histoire se situe dans les années 2010, environ, le téléphone portable est courant, on ne parle pas encore de smartphone.

L’auteur. Philippe Besson, écrivain, dramaturge et scénariste français, il a été également critique littéraire et animateur de télévision. Auteur de 36 livres, il a reçu le prix RTL Lire en 2003, et le prix des Maisons de la presse en 2017.

Ce livre a été lu avec effroi, car dès le début, chaque page apporte son lot de scènes, de paroles, de faits bruts, sans fards, et qui tel un couteau entame notre chair et notre esprit. On se demande si cette succession de catastrophes cessera, et c’est en arrivant à la fin du livre que l’on prend conscience du désastre.

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