«Mercy, Mary, Patty»: On n'est jamais si libre que lorsqu'on est otage
RENTREE•Les lectures coups de cœur, ça se partage. Notre communauté vous recommande chaque jour un nouveau livre. Aujourd'hui, «Mercy, Mary, Patty» par Lola Lafon chez Actes Sud (238 p., 19,80€).Ecrit par la communauté
L'essentiel
On a lu pour vous «Mercy, Mary, Patty» par Lola Lafon chez Actes Sud (238 p., 19,80€).
Ma citation préférée :
« « L’histoire de Patricia Hearst est aussi celle-là, celle d’une jeune fille qui se débat, prise en tenaille entre des hommes qui en réclamaient tous la propriété, le révolutionnaire Cinque, son fiancé comme son père. » »
Pourquoi ce livre ?
- Parce que Lola Lafon sait choisir ses héroïnes. Après Nadia Comaneci dans son précédent ouvrage, la romancière s’attaque à un autre mythe de la fin des années 1970 : Patricia Hearst, héritière d’un richissime magnat de la presse, enlevée contre rançon par un groupe d’extrême-gauche dont elle finit par épouser la cause. Elle ira jusqu’à braquer une banque avec ses ex-geôliers.
- Parce que cette histoire pourrait être simple. Patricia était une fille. Jeune. On lui a donc lavé le cerveau. Mieux, elle s’est fait berner par ses hormones. Mercy, Mary, Patty chausse de tout autre lunettes pour lire l’affaire. Ici, pas de syndrome de Stockholm ou de jouvencelle intoxiquée par plus malin qu’elle… Lola Lafon fait du revirement de l’héritière un acte conscient d’émancipation. Une trouvaille très convaincante…
- Parce que l’auteur suggère que l’histoire de Patricia est aussi celle de Mercy et Mary, deux jeunes Américaines enlevées par des indiens. Découvrant en captivité un autre rôle que celui de femme soumise que leur réservait la société blanche, elles refusèrent, une fois retrouvées, de retourner dans leurs familles. Patricia, dont le père marchanda le montant de la rançon ? Une sorte de Prisonnière du désert affectif. Mais John Wayne n’est pas loin. Une fois arrêtée par le FBI, la famille Hearst usera de sa fortune et de son entregent pour adoucir sa peine puis pour la gracier. Happy End…
- Parce que le roman est élégant et subtil. Le livre est écrit à la deuxième personne, comme une confession amoureuse. Au fil des pages, la narratrice s’adresse à Gene. En l’interpellant, elle l’assujettit peu à peu. Et l’universitaire devient une idée, un idéal. On est définitivement loin de la simple biographie.
L’essentiel en 2 minutes
L’intrigue. Pour étayer la défense de Patricia Hearst, otage devenue braqueuse, son avocat fait appel à Gene Neveva, universitaire rebelle. Elle-même s’offre les services d’une pucelle locale. Ces trois femmes et quelques captives indiennes se mettent à nous parler libération…
Les personnages. Patty, Gene, Violaine, la narratrice… Dans ce roman, on ne croise que des femmes mais l’homme au comportement de petit-maître rôde dans l’ombre.
Les lieux. Un village des Landes, terre moutonnière s’il en est. Quand Gene, puis Violaine, grimpent sur leurs échasses, ce n’est pas tant pour prendre de la hauteur que pour chercher de l’air.
L’époque. Pendant les Années de plomb. Les inégalités augmentent. L’Etat s’en lave la main invisible. S’embourbe au Vietnam. Fait tirer sur des étudiants. L’Amérique insoumise est prête à se mettre en marche.
L’auteur. Cinquième roman pour Lola Lafon, qui a rencontré un succès mérité en 2014 avec La Petite Communiste qui ne souriait jamais. On souhaite le même destin à l’excellent Mercy, Mary, Patty.
Ce 2min' a été préparé en se goinfrant d’Amou par Laurent : « Lecteur de pages de journal à titre professionnel. Les livres ne me font plus peur. »
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