Dunkerque : Le projet de construction de deux réacteurs nucléaires divise élus et militants
ENERGIE•L’annonce par Emmanuel Macron de deux nouvelles centrales nucléaires à Gravelines ravit le président de la Communauté urbaine de Dunkerque, mais ne fait pas l’unanimitéGilles Durand
L'essentiel
- Le président Emmanuel Macron a annoncé, jeudi, que deux nouveaux réacteurs EPR devaient être construits à Gravelines, près de Dunkerque, d’ici à 2035.
- L’annonce a ravi le président de la communauté urbaine de Dunkerque qui se félicite des nombreux emplois induits.
- L’association Virage Energie dénonce, de son côté, « une annonce du siècle dernier pour enterrer l’avenir ».
Dans le Dunkerquois, le nucléaire, on connaît. Voilà plus de 40 ans que la plus grosse centrale d’Europe de l’ouest, à Gravelines, alimente le pays en électricité. Jeudi, le président Emmanuel Macron a annoncé que deux nouveaux réacteurs nucléaires EPR devaient y être construits d’ici à 2035. Une promesse de candidat en campagne plus qu’une décision gouvernementale puisque la programmation pluriannuelle de l'énergie, pilotée par le ministère de la Transition écologique, prévoit toujours la fermeture de 14 réacteurs nucléaires (dont deux à Gravelines) d’ici à 2035.
L’annonce a néanmoins relancé le débat sur l’avenir du nucléaire en France. Pour le président (DVG) de la communauté urbaine de Dunkerque, Patrice Vergriete, il s’agit d’une « grande victoire » pour le territoire et d'« une nouvelle période d’expansion économique synonyme de milliers d’emplois durables pour le Dunkerquois ».
Transformation de la plateforme industrialo-portuaire
« Le mix énergétique promu par le président Macron dans son discours de Belfort est, en effet, au cœur des choix stratégiques qui ont été les nôtres ces dernières années, se félicite Patrice Vergriete. En soutenant (…) la complémentarité entre énergies nucléaire et renouvelable, (…) nous avons engagé cette transformation de notre plateforme industrialo-portuaire. »
Du côté des militants écologistes, l’enthousiasme est moins palpable. « La relance du nucléaire est une annonce du siècle dernier pour enterrer l’avenir », déplore Paulo-Serge Lopes, président de l’association Virage Energie.
Pour ce membre de la commission locale d’information de la centrale nucléaire de Gravelines, « l’annonce va totalement à rebours des propres investigations du Réseau de transport d’électricité (RTE) en charge de l’approvisionnement électrique. Son rapport, publié en octobre, estime faisable un mix électrique 100 % issus d’énergies renouvelables d’ici cet horizon pour atteindre la neutralité carbone. »
Fiabilité de l’EPR ?
Autre argument avancé par Paulo-Serge Lopes, l’absence de fiabilité de l’EPR. « Ce réacteur n’a pas encore été homologué et validé par la propre autorité de sûreté nucléaire, seule habilitée à le faire, explique-t-il. Le retour d’expériences sur lequel son projet se base est un échec cinglant comme en atteste le chantier à Flamanville (Manche), avec un retard d’au moins 10 ans et un coût multiplié par 6, relevé par la Cour des comptes. »
Le militant demande un débat national sur le sujet. « L’investissement dans une filière énergétique est une décision conséquente avec des incidences sur des décennies », note-t-il.
Le problème du stockage des déchets
L'énergie nucléaire reste notamment soumise à deux points cruciaux. Si les centrales nucléaires n’émettent pas de CO2, ce dernier « est néanmoins relâché lors de l’extraction de l’uranium ou du démantèlement d’une centrale, par exemple », souligne le magazine TerraEco.
Et le problème du stockage des déchets nucléaires est loin d’être résolu. « Les déchets débordent à la Hague, prévient la section Europe Ecologie-Les Verts (EELV) de Normandie. L’usine n’a pas les capacités de stockage des combustibles irradiés au-delà de 2025 ou 2030 selon les sources averties. »