La situation se dégrade pour les Roms à Lille
SOLIDARITE•Depuis le mois de juillet, les expulsions sèches de bidonvilles ont repris dans la métropole lilloise. Des associations regrettent le retour de cette politique sans solution de relogement pour les familles romsFrançois Launay
L'essentiel
- Ces dernières semaines, des expulsions sèches de campements et de squats se sont succédé à Lesquin, Ronchin, Tourcoing ou encore Sainghin-en-Mélantois dans une métropole lilloise où 1.000 Roms vivent.
- Une méthode que déplorent les associations d’aide aux Roms qui lient cette situation à l’arrivée d’un nouveau préfet.
Au bord de la Deûle, à quelques centaines de mètres du parc de la Citadelle, c’est un bidonville situé en plein cœur de Lille. Au lieu-dit des Pyramides, une centaine de Roms s’entassent dans des baraquements en bois depuis des années. Une situation intenable qui aurait dû normalement cesser cet été.
Fin juin, la préfète à l’égalité des chances était même venue sur le campement pour annoncer que le bidonville allait disparaître. Des familles avaient commencé à visiter des logements dans la métropole et des contrats avec des bailleurs sociaux avaient même été signés. Mais depuis le 15 juillet, tout est à l’arrêt. « Il n’y a plus de son, plus d’image. On n’a aucune explication. C’est un gâchis financier et humain car des logements qui avaient été réservés à ces familles sont vides depuis juillet. On est dans une situation totalement absurde », constate Dominique Plancke, membre du collectif solidarité Roms de Lille Métropole.
« Un retour en arrière tragique »
Pour le collectif, pas de doute : ce revirement est lié à l’arrivée cet été du nouveau préfet de région. Avant sa nomination, les expulsions de Roms des bidonvilles étaient suspendues tant qu’une solution de relogement n’avait pas été trouvée. « Depuis trois ans et l’instruction gouvernementale du 25 janvier 2018, les expulsions sèches de bidonvilles avaient été arrêtées. Elles ne servaient à rien car elles ne faisaient que déplacer le problème. On retrouvait des gens errer dans la métropole avec des ruptures de scolarisation pour les enfants. Avec cette instruction, l'objectif c’était: pas d’expulsion sans proposition de relogement ou d’hébergement. S’il n’y avait pas de solution immédiate de relogement, il y avait une suspension de la procédure d’expulsion », rappelle Dominique Plancke.
Mais depuis cet été, les expulsions manu militari de Roms ont repris. Ces dernières semaines, des expulsions sèches de campements et de squatts se sont succédé à Lesquin, Ronchin, Tourcoing ou encore Sainghin-en-Mélantois dans une métropole lilloise où 650 Roms vivent dans des bidonvilles et 350 autres dans des squatts.
« Les démarches d’insertion patiemment construites par les élus, les associations, les services de l’Etat et les gens sont démontées.
C’est un retour en arrière tragique puisqu’on revient à des situations complètement inhumaines de précarisation renforcée, de gens qui ne vont plus à l’école, d’accès à l’emploi compliqué. Car aucune procédure alternative à ces départs n’a été faite », explique le membre du collectif.
La préfecture ne souhaite pas répondre
Mais pourquoi un tel revirement si le fonctionnement précédent avait fait ses preuves ? Pour Bertrand Verfaillie, membre du collectif solidarité Roms, la campagne présidentielle qui débute joue beaucoup. « On est sur une politique du tout répressif à la proximité d’une élection. C’est une rupture totale qui s’avère inefficace et sur laquelle le préfet devra revenir tôt ou tard comme tous ceux qui ont voulu régler le problème d’un coup de talon et le menton haut. Ça ne va pas durer même si on est actuellement sur quelque chose de désastreux ».
Pour régler le problème, le collectif demande une rencontre avec le préfet et le retour à l’application de l’instruction gouvernementale qui avait fait ses preuves. Contactée, la préfecture du Nord n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations.