Lille : Morsures et griffures dans les crèches, peut-on les éviter ?
PETITE ENFANCE•Un récent dépôt de plainte contre une microcrèche de la métropole lilloise pose la question des relations entre les enfantsGilles Durand
L'essentiel
- Une famille de Wervicq-Sud, près de Lille, vient de déposer plainte contre une microcrèche de la métropole de Lille pour « blessures involontaires ».
- Lors de son premier jour de crèche, une petite fille de huit mois a été profondément mordue et griffée par un autre enfant.
- « Les morsures et les griffures entre enfants sont des sujets encore trop tabous », selon un spécialiste de la petite enfance.
S’il s’agissait d’adultes, les responsabilités seraient vite établies. Or, ce sont des enfants de moins de 3 ans qui sont concernés. Une famille de Wervicq-Sud, près de Lille, vient de déposer plainte contre une microcrèche de la métropole de Lille pour « blessures involontaires ».
Le 31 août, leur petite fille de huit mois, Gabrielle, effectuait son premier jour en crèche, lorsqu’elle a été profondément mordue et griffée par un autre enfant. Prévenue au téléphone par une auxiliaire de puériculture, la mère retrouvait l’enfant avec le visage tuméfié : une joue droite violette et plusieurs griffes autour du nez et de l’œil.
« Négligence manifeste »
« La professionnelle lui a avoué qu’elle ne connaissait pas les circonstances exactes de l’agression, mais qu’un autre enfant semblait s’être jeté sur la fillette, explique Damien Legrand, avocat de la famille. Elle a aussi expliqué que l’enfant fautif avait déjà mordu deux autres enfants. »
Malgré les excuses de la directrice, le lendemain, le père et la mère de Gabrielle décident de la retirer et de porter plainte après constat du médecin. « Ils sont traumatisés par cette affaire. C’est leur premier enfant et c’était la première fois qu’ils la confiaient à un tiers », souligne l’avocat.
Pour Me Damien Legrand, il s’agit « d’une négligence manifeste ». « La crèche n’a pas pris les mesures nécessaires vis-à-vis de l’enfant mordeur et il y semble y avoir eu un défaut de surveillance. La famille estime que le prix qu’elle paie pour cette crèche privée doit garantir la sécurité et la tranquillité de son enfant. »
« Les morsures et les griffures sont des sujets encore tabous »
Sans présager de la responsabilité ou non de la crèche dans cette affaire, un formateur spécialiste de la petite enfance relativise ce genre de situation. « Les morsures et les griffures sont des sujets encore trop tabous. Or, il faut en parler aux parents dès l’entrée de l’enfant en crèche », estime Jérôme Dumortier, fondateur de COJD Petite enfance, interrogé par 20 Minutes.
Selon lui, « tous les enfants mordent et tous les enfants griffent un jour ou l’autre, cela fait partie de l’apprentissage des relations aux autres. Pour eux, c’est une réaction instinctive et pulsionnelle qui ne vise pas à faire mal. Avant le bisou câlin, il y a le bisou qui mord ».
« La bouche qui fait office de troisième main »
Mais il ne s'agit de laisser faire. C’est le rôle des adultes d’apprendre à canaliser les émotions de l’enfant. « En général, explique Jérôme Dumortier, on console le mordu et le mordeur est invité à le soigner avec un gant humide en expliquant que ça fait mal. »
« Un enfant découvre le monde par la bouche qui fait office de troisième main », note aussi Héloïse Junier, psychologue en crèche dans la revue Les pros de la petite enfance. Pour le reste, c’est la justice qui tranchera.