Nord : Des craintes autour d'un projet d’usine de fabrication de frites
ENVIRONNEMENT•Dans un contexte de crise de surproduction de pommes de terre, un projet d’usine agroalimentaire de fabrication de frites se heurte à la résistance d’un collectifGilles Durand
L'essentiel
- Un collectif de riverains milite pour empêcher la société belge de transformation de pommes de terre, Clarebout, d’installer une usine près de Dunkerque (Nord).
- Les habitants craignent des nuisances olfactives et sonores, mais aussi sur les ressources en eau.
- Ce projet d’usine s’inscrit dans la crise actuelle de surproduction de pommes de terre.
Des habitants du Nord disent « non à la friture ! ». Un collectif, notamment de riverains, milite, via les réseaux sociaux, pour empêcher la société belge de transformation de pommes de terre, Clarebout, d’installer une usine entre les communes de Saint-Georges-sur-l’Aa et de Wormhout, près de Dunkerque (Nord).
Cette usine prévoit de fonctionner 24h/24 pour produire quotidiennement 1.400 tonnes de frites surgelées ou autres spécialités. A la clé, 320 emplois, mais aussi la réticence des habitants qui craignent des nuisances olfactives, sonores et sur les ressources en eau.
Environ 2 millions de m3 d’eau par an
« Alors que le changement climatique accentue les épisodes de sécheresse, y compris dans notre région, EELV craint une mise en concurrence quant à l’accès en eau entre besoins industriels et nécessité des habitant·e·s », assure ainsi le parti écologiste, dans un communiqué.
Car la consommation de l’usine sera d’environ 2 millions de m3 d’eau par an et la station d’épuration qui doit jouxter le bâtiment doit traiter une pollution d’environ 600.000 équivalent-habitants.
Interrogée par France 3, l’entreprise belge donne des garanties. Concernant la pollution de l’eau, elle assure avoir imaginé un plan de récupération et de transformation de l’eau vertueux en utilisant l’eau non potable du canal. Pour l’air, la société promet que les vapeurs de cuisson ne seront pas rejetées hors de l’usine, mais traitées à l’intérieur des murs.
Une situation « conjoncturelle »
En décembre 2019, l’autorité environnementale estimait d’ailleurs que « les études détaillées » de Clarebout montraient « des impacts sur l’air, le bruit et la santé humaine bien maîtrisés ». Mais ce projet s’inscrit dans un contexte économique nouveau : la crise de surproduction de pommes de terre.
Avec le confinement lié à l’épidémie de Covid-19, 400.000 tonnes restent sur les bras des patatiers français. Une situation que la Chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais juge « conjoncturelle » et espère voir s’améliorer rapidement.
« Nous sommes favorables à l’implantation de cette usine car il y a une forte progression de la production de surgelés en Europe, depuis vingt ans, et c’est la première fois qu’un industriel passe la frontière de la Belgique vers la France, explique Christian Durlin, président de la Chambre. Alors, plutôt que de voir nos pommes de terre traverser la frontière pour être transformés en Belgique, autant le faire chez nous. »
« On doit s’adapter l’évolution de la consommation »
Une analyse que ne partage pas une militante, contactée par 20 Minutes. « La quantité de pommes de terre nécessaire pour cette usine représente près de la moitié de la production de consommation du Nord-Pas-de-Calais et nécessitera d’utiliser près de 50 % de la surface cultivée du territoire Flandres Dunkerque. En plus, c’est en contradiction avec l’engagement de la Communauté urbaine de Dunkerque en faveur d’une agriculture biologique et des circuits courts de proximité », dénonce-t-elle.
« On doit s’adapter à l’évolution de la consommation qui privilégie le surgelé. La pomme de terre a une forte valeur ajoutée. Il serait dangereux de remettre en cause sa culture », estime, de côté, Christian Durlin.
L’enquête publique sur le projet Clarebout, relancée le 29 avril, pendant le confinement, a pris fin, la semaine dernière. Le collectif « Non à la friture à Saint-Georges-sur-l’Aa » annonce le dépôt de 800 contributions, dont environ les trois quarts se montraient défavorables au projet. Reste à la commissaire enquêtrice à rendre son avis vers la mi-juin.