Pas-de-Calais : Deux passeurs condamnés à de la prison ferme après la noyade d’une migrante
JUSTICE•Après la noyade, en août, d’une migrante, lors d’une traversée entre la France et la Grande-Bretagne, deux passeurs ont été condamnés à de la prison fermeG.D. avec AFP
L'essentiel
- Deux passeurs ont été condamnés, mercredi, à six et trois ans de prison ferme pour homicide involontaire et aide au séjour irrégulier.
- Une Iranienne de 31 ans, a été vraisemblablement la première migrante à mourir noyée dans la mer, en août, entre la France et la Grande-Bretagne.
- Lors du procès, la procureure a évoqué un réseau très lucratif, pouvant rapporter 59.000 euros par traversée.
Une migrante était décédée dans la Manche lors d’une traversée clandestine vers l’Angleterre. Deux passeurs ont été condamnés, mercredi, à six et trois ans de prison ferme par le tribunal de Boulogne-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais, pour homicide involontaire et aide au séjour irrégulier.
Selon les autorités françaises, Mitra M., une Iranienne de 31 ans, a été vraisemblablement la première migrante à mourir noyée dans la mer entre la France et la Grande-Bretagne.
Titulaire d’un master de psychologie
Cette titulaire d’un master de psychologie avait embarqué le 9 août sur un bateau pneumatique aux côtés de 19 migrants irakiens et iraniens, dont sept mineurs. A court d’essence, sans rames, l’embarcation avait été secourue par la marine britannique mais trois personnes s’étaient auparavant jetées à l’eau.
Deux hommes avaient été repêchés vivants, mais Mitra M. était portée disparue avant que son corps ne soit retrouvé sur une plage des Pays-Bas, le 18 août.
Les autorités françaises avaient interpellé, le 7 octobre, sur l’autoroute A6, les deux passeurs, un Afghan de 31 ans et un Néerlandais d’origine guinéenne de 44 ans. Selon l’enquête, les deux individus ont acheté huit bateaux et permis la tentative de traversée de 84 clandestins en l’espace de deux mois.
Des écoutes « très précises »
A la barre du tribunal de Boulogne-sur-Mer, l’Afghan a nié toute implication dans l’organisation des passages mais admis avoir « aidé à charger des bateaux dans le véhicule » pour financer sa traversée. Face à lui, le président s’est appuyé sur des écoutes « très précises » dans lesquelles l’homme évoque « l’achat de bateaux », « des passages à 3.500 euros par client » et « la police présente sur la plage ».
Le Néerlandais a accepté de transporter des bateaux destinés à la traversée. En contact, les deux hommes avaient multiplié les allers-retours pour acheter les embarcations pneumatiques et les amener sur le littoral.
Environ 59.000 euros par passage
Rappelant la dangerosité des passages par voie maritime, la procureure a évoqué un réseau très lucratif. « Avec une vingtaine de migrants sur une embarcation, on peut estimer que cela rapportait 50.000 livres (59.000 euros) par passage. Ces personnes acceptent de s’enrichir en profitant de la détresse humaine », a-t-il dénoncé.
Voir le dossier sur les migrants
Le tribunal a également prononcé un maintien en détention et une interdiction définitive du territoire français pour les deux hommes.
Depuis la fin 2018, les tentatives de traversée se sont multipliées dans la Manche malgré le danger lié à la densité du trafic, aux forts courants et à la faible température de l’eau. En 2019, 254 opérations de sauvetage ont été réalisées, impliquant 2.521 migrants qui tentaient de rejoindre l’Angleterre par la mer, selon un bilan actualisé de la préfecture maritime.