Lille: Pourquoi la coupe de France des sans-abri change (un peu) le quotidien des SDF
REPORTAGE•Une association lilloise a organisé mardi la deuxième édition d’une coupe de France exclusivement réservée aux sans-abri…François Launay
L'essentiel
- Treize équipes venues de structures d’accueil des Hauts-de-France avaient fait le déplacement pour cette deuxième édition de la coupe de France des sans-abri à Lille.
- Cette journée est importante pour des sans-abri qui oublient leur quotidien difficile à travers ce tournoi de foot.
La pluie n’a pas cessé de tomber, les conditions étaient vraiment exécrables pour jouer au foot et pourtant les sourires n’ont pas quitté les visages de la centaine de sans-abri venus se changer les idées. Mardi à Lille s’est déroulé la deuxième édition de la coupe de France des sans-abri. Créée par le collectif des SDF de Lille, la compétition réunit des équipes formées exclusivement de sans-abri.
« La seule obligation c’est d’avoir 16 ans et d’être sans domicile fixe. Les participants viennent de structures d’hébergement d’urgence, de centres d’hébergement ou d’accueils de jour. Ils sont dix par équipe, on leur fournit le maillot mais ils doivent ramener shorts et chaussures. Le vainqueur gagne un trophée et des équipements du LOSC. Les équipes de tout le pays sont invitées mais comme on ne peut pas les loger, ce sont surtout des formations des Hauts-de-France qui se déplacent », détaille Rémi Vandermollen, éducateur au collectif des SDF de Lille, association qui œuvre pour le relogement direct des sans-abri.
« Une journée de partage entre personnes de la rue »
Cette année, treize équipes (Lille, Cambrai, Saint-Omer, Creil…) ont donc fait le déplacement au stade Jean-Bouin de Lille. Toute la journée, les sans-abri jouent au foot mais échangent aussi entre eux sur les difficultés de leur quotidien.
« C’est une journée solidaire de partage entre personnes de la rue. C’est important de tous se rencontrer. Dans les structures, ils sont enfermés. Et là, ils rencontrent d’autres personnes qui ont d’autres vécus, d’autres parcours. Ça crée des liens. Ils sont contents », se réjouit Gilbert Pinteau, président et fondateur du collectif des SDF de Lille.
Un autre regard sur les sans-abri
C’est lui qui a eu l’idée de cette compétition entre sans-abri soutenu en grande partie par la ville de Lille. « L’accès au sport pour les sans-abri n’était pas évident et je pensais qu’il fallait leur proposer des activités en extérieur. C’est bien aussi de montrer qu’il n’y a pas que des gens drogués ou alcoolisés à la rue. Il y a aussi des gens motivés. Cette journée leur permet vraiment de s’évader et d’oublier le quotidien des structures. Ils se sentent valorisés » poursuit Gilbert Pinteau qui a vécu douze ans dans la rue.
Motivés comme jamais après s’être entraînés toute l’année pour ça, les SDF se sentent mis en valeur l’espace d’une journée, loin de l’indifférence habituelle.
Une journée qui change d’un quotidien d’indifférences
« On est mal vu au quotidien. Les gens passent devant nous et s’en foutent. Pour eux, on ne fait pas partie du système. On est à part et ça fait vraiment mal. Mentalement, ça détruit le cerveau et ça fait perdre espoir. On se dit qu’on est une merde. Alors cette journée est un vrai moment de partage où on peut créer des amitiés et rigoler sans rester dans sa solitude habituelle », raconte Kevin Petit, membre du collectif, qui a passé trois mois dans la rue.
Seul événement de ce type dans l’Hexagone, le collectif aimerait désormais étendre ce tournoi à toutes les régions de France. Histoire de donner un peu de baume au cœur aux milliers de SDF du pays.