Nord: Trois personnes handicapées testent des bras robots
INNOVATION•Le conseil départemental a financé l’expérimentation d’une technologie permettant aux personnes à mobilité réduite de gagner en autonomie…Mikaël Libert
L'essentiel
- Trois handicapés ont été dotés de bras robotisés fabriqués au Canada.
- Le département du Nord finance cette expérimentation unique en France.
- Le coût du matériel est d’environ 50.000 euros par bras Jaco installé.
Trois doigts d’autonomie. Depuis trois semaines, Mélinda, une jeune nordiste handicapée, trimbale un étrange appendice greffé sur le côté gauche de son fauteuil électrique. L’organe s’appelle Jaco et il arrive directement du Canada. Il s’agit d’un bras robotisé high-tech qui doit lui permettre de faire seule des gestes depuis longtemps oubliés.
« Au début, ce n’était pas facile, reconnaît Mélinda. Mais au bout d’une semaine, c’était bon », assure-t-elle. Ajoutant le geste à la parole, elle se saisit d’un verre d’eau à l’aide des trois doigts de Jaco, « Jaja » comme elle l’appelle désormais. « On peut faire à peu près tout ce que l’on fait habituellement avec un bras normal, poursuit-elle. Sauf la toilette. »
« Une jeune femme parvient même à se maquiller avec »
« C’est une question de temps, d’habitude et d’entraînement, assure Gwen Grevelinger, de la société Ergo diffusion qui commercialise le produit en France. Une jeune femme qui l’utilise à Nantes parvient même à se maquiller avec », affirme-t-elle. Jaco est aussi programmable, notamment pour certains gestes répétitifs. « On ne se rend pas compte, mais le simple fait de remonter ses lunettes, de trinquer ou de se gratter seul est très important pour les utilisateurs », poursuit la commerciale.
« L’idée n’est pas de réduire à terme les heures de prestation compensation handicap, promet Geneviève Mannarino, vice-présidente en charge de l’autonomie au département. Il y a simplement des choses pour lesquelles les personnes en situation de handicap n’ont pas besoin d’une aide humaine », ajoute-t-elle.
Une expérimentation sur 18 mois
« Je ne veux pas me séparer de mon auxiliaire de vie, assure Mélinda. Mais il arrive que l’on ait envie de se retrouver seul parfois, ou juste de sortir avec des amis sans avoir à demander de l’aide pour boire son verre. »
Le département a acheté trois bras Jaco à environ 50.000 euros pièce. « L’expérimentation va durer 18 mois et il y aura des évaluations régulières pour quantifier le gain en autonomie des personnes, explique la vice-présidente. La question sera ensuite de savoir si les pouvoirs publics peuvent prendre ce dispositif en charge. »
Une démarche qui intéresse aussi le distributeur de Jaco qui, pour l’heure, n’a vendu que six modèles en France : « Grâce à cette étude, nous allons pouvoir montrer à quel point l’aide apportée est précieuse. En Allemagne ou en Hollande, le système d’assurance santé prend déjà en charge ce matériel », plaide Gwen Grevelinger.
Mélinda, elle, continue d’apprendre à maîtriser la bête : « Je sais déjà ouvrir les portes, boire ou allumer les lumières. Là, je m’entraîne pour aller chercher mes vêtements dans mon armoire et faire les magasins ». Pour dire au revoir, elle préfère faire la bise, c’est plus rapide que serrer la main.