Nord: Comment un bâtiment historique de 20.000m² est «sauvé» par une niche fiscale
IMMOBILIER•La ville de Marquette-lez-Lille a mis sur les rails la réhabilitation immobilière des 25.000 m³ des «Grands Moulins de Paris»...Olivier Aballain
Sur le papier, tout le monde y gagne. La ville de Marquette, près de Lille, a présenté jeudi le projet immobilier qui doit permettre, d’ici 2021, de transformer les 25.000 m² des « Grands Moulins de Paris » en ensemble de 265 logements privés.
Porté par la financière Vauban, le projet s’accompagne de la construction de 80 à 100 logements sociaux, par le bailleur Villogia.
Un dossier vieux de vingt ans
Le maire, Jean Delebarre, voit aboutir ainsi un dossier vieux de 20 ans. Car les Moulins de Paris étaient en friche depuis 1989, date de l’abandon de toute activité de meunerie. Une adolescente avait d’ailleurs tragiquement trouvé la mort sur le site, en juin, à la suite d’une chute accidentelle.
Si les permis de construire sont validés comme espéré, les travaux de réhabilitation pourront démarrer en 2018, avec une livraison du bâtiment totalement rénové en 2021. « Le centre de la commune va se déporter vers ce site », promet Jean Delebarre, qui s’attend à recevoir, à terme, un millier de nouveaux habitants.
Le bon coup fiscal du maire de Marquette
Le coût total du chantier n’est pas connu, mais il se comptera « en dizaines de millions d’euros », indique l’architecte Hubert Maes.
Mais comment le maire de cette commune de 10.300 habitants a-t-il convaincu les investisseurs ? Grâce à une bonne dose de persévérance, pour faire entrer le projet dans le cadre très contraint de la rénovation d’un bâtiment historique. Car ce type de label n’est octroyé, en moyenne, « que pour cinq projets par an en France », indique l’architecte Hubert Maes.
Le jeu en vaut la chandelle : les acheteurs pourront tout simplement déduire le coût des travaux de leur revenu fiscal. Sans aucun plafond. Seul le coût d’acquisition du bien « brut » n’est pas déductible. Et selon la Financière Vauban, sur ce type de projet, la rénovation représente environ les trois-quarts du coût final ». « Evidemment, cela permet d’envisager une rénovation de grande qualité », poursuit le porteur du projet. « Je reçois des demandes de partout en France », confie le maire.
La niche fiscale « Monuments historiques » est prévue parl’article 156 du code général des impôts. Mais ses conditions d’application se sont durcies en 2009, puis en 2014. « En général, le ministère des Finances n’aime pas trop ce type de dispositif », confie un proche du dossier.
Rénovation plutôt simple, une fois bouclée la partie administrative…
Les « Grands Moulins de Paris » ont eu droit à un obstacle supplémentaire : construit en 1920 avec une architecture d’inspiration néoflamande, l’ensemble est inscrit à « l’inventaire supplémentaire » des monuments historiques, et non formellement classé « monument historique ». Il lui a donc fallu une autorisation spécifique, permise par la loi Macron de 2015, pour bénéficier du dispositif.
L’agrément a finalement été délivré en décembre.
La construction des 265 logements privés et des 80 à 100 logements à loyer modéré devrait occuper environ 700 ouvriers d’ici à 2020. Hubert Maes, l’architecte, est confiant : « Le bâtiment est très sain car à l’époque ils surdimensionnaient les piliers de béton, par sécurité. Et il n’y aura pas de mauvaise surprise, car il n’y a plus rien à enlever ». Il reste tout de même un détail : obtenir le permis de construire, et surmonter les recours éventuels. Un dernier coup de collier, après 20 ans de procédure.