VIDEO. Cyclisme : On a testé le dopage mécanique (ça envoie et c'est facile à se procurer)
CYCLISME•Dans la ville belge de Wevelgem, Christophe Lefebvre vend et installe des moteurs indétectables pour vélo...Texte: François Launay. Vidéo: Mikaël Libert
L’endroit n’a rien d’une forteresse gardée. Bien au contraire, la boutique de vélos Bike Concept a pignon sur rue dans la commune de Wevelgem. Connue pour accueillir l’arrivée de la célèbre classique Gand-Wevelgem, la cité flamande a aussi un parfum de scandale. Car c’est ici que Christophe Lefebvre s’est spécialisé dans un objet qui suscite la controverse dans le milieu du vélo : le moteur électrique. Mercredi, Christian Prudhomme, directeur du Tour de France, a même réclamé des contrôles systématiques lors de l’édition 2016 pour lutter contre une nouvelle forme de tricherie : le dopage mécanique.
« Christian Prudhomme invite l’UCI à accentuer les contrôles de vélos https ://t.co/cB8eR85Hp3 pic.twitter.com/mDeAltrglx — CyclingPro.net (@cyclingpronet) February 13, 2016 »
Un premier cas de dopage mécanique détecté
Après des années de suspicion, le premier cas de dopage mécanique a été mis à jour le 30 janvier. Lors du championnat du monde espoir de cyclo-cross féminin, un petit moteur électrique a été découvert dans le vélo de la Belge Femke Van den Driessche. Exactement le même système que Christophe Lefebvre est le seul à vendre dans le Nord de l’Europe. Il nous présente son fonctionnement dans la vidéo ci-dessous
Un petit moteur à 3000 euros
Fabriqué par la marque autrichienne Vivax, ce système, indétectable à l’œil nu, coûte 3000 euros et est parfaitement légal. Distributeur exclusif de la marque en Belgique, Luxembourg, Pays-Bas, Angleterre, Irlande et France, le magasin de Wevelgem vend et installe environ 2000 moteurs de ce genre par an. Petit et léger (1,8 kg), il s’introduit facilement dans le vélo. Initialement, ce système s’adresse surtout aux amateurs qui rêvent d’imiter leurs idoles.
Le système de moteur électrique est (presque) totalement indétectable. - M.Libert/20 Minutes
Le Mont Ventoux assis sur sa selle
« En Belgique, beaucoup de gens rêvent de faire l’ascension du Mont Ventoux. Et bien, avec ça, ceux qui l’ont monté ne se sont même pas levés de leur selle » sourit Christophe qui prend aussi l’exemple d’un de ses fidèles clients. « A 93 ans, Willy peut continuer à faire du sport. Avec ce système, il peut même faire jusqu’à 60 kilomètres par jour. C’est super ».
S’il ne sert à rien ou presque sur du plat ou en descente, le moteur électrique peut, par contre, être rapidement décisif en montée. « Par exemple, un cycliste professionnel en forme produit en moyenne 350 à 370 watts en puissance dans les jambes. Avec ce moteur, on peut ajouter 200 watts d’un coup, c’est énorme ».
Quand les équipes pros achètent le système…
Aujourd’hui, aucun cas de dopage mécanique n’a encore été révélé dans une grande course sur route comme le Tour de France ou Paris-Roubaix. Pourtant, Christophe Lefebvre ne le cache pas, plusieurs équipes professionnelles « venues de partout » l’ont appelé pour acheter ce système. Il a même appris aux mécanos comment l’installer.
Officiellement, le système est utilisé pour la rééducation de coureurs après blessure. De là à dire que certains s’en sont servis en compétition, il y a un pas que le commerçant ne préfère pas franchir. « On ne sait pas ce qu’ils en font ensuite. Si vous achetez une voiture et qu’ensuite vous décidez ne pas l’immatriculer, ce n’est pas le problème du vendeur ».
« Au lieu de prendre du sang, il aurait mieux valu vérifier les vélos »
Reste que le commerçant n’est pas dupe. « Même si je les vends, je suis pour une compétition propre. Le problème, c’est qu’on s’est trop focalisé sur le dopage dans le corps humain et on ne réagit que maintenant pour les moteurs. Rien n’a été contrôlé avant. Au lieu de prendre du sang, il aurait mieux valu vérifier les vélos. Le seul moyen d’éviter la tricherie, c’est de contrôler tous les vélos et de mettre des scellées ». Et si possible avant, pendant et après la course.
Une autonomie d’une heure et demie maximum
Car la batterie a une autonomie limitée. Au-delà d’une heure et demie, elle s’épuise et le coureur ne peut plus s’aider du moteur. Mais en compétition, on peut aussi changer de vélo à n’importe quel moment. C’est donc sur les voitures des mécanos qu’il faut accroître les contrôles. Quant aux autres coureurs, il est quasiment impossible pour eux de se rendre compte du stratagème.
Après essai du système, on peut vous l’affirmer : le son du moteur est inaudible. Et un coup de frein ou un geste non naturel sur la machine stoppent automatiquement le moteur. Bref, tout est extrêmement bien pensé pour ceux qui veulent tricher en compétition. Le dopage mécanique n’est vraiment plus un fantasme.