COMMEMORATIONPas-de-Calais: Pourquoi des soldats de la guerre 14-18 n'auront peut-être jamais de sépultures

Pas-de-Calais: Pourquoi des soldats de la guerre 14-18 n'auront peut-être jamais de sépultures

COMMEMORATIONLa localisation d'une soixantaine de corps de soldats britanniques de la Première Guerre mondiale, dans un champ en Artois, embarrasse les autorités...
Gilles Durand

Gilles Durand

Un hommage à deux vitesses. Le président de la République, François Hollande, inaugurera l'Anneau de mémoire, le 11 novembre, à Notre-Dame-de-Lorette, près d'Arras. Sur ce monument sont inscrits les noms de 580.000 soldats morts ou portés disparus durant la Première Guerre Mondiale. C'est une soixantaine d'entre eux qui ont été repérés, fin septembre, dans un champ à Bullecourt, à 35 km de là. Mais pas sûr que leur nom soit, un jour, inscrit sur une véritable tombe. Au grand dam de certaines familles.

Recherches interdites

Les recherches de localisation des corps, menées par deux historiens australiens ont été brutalement interrompues par les autorités françaises. Motif: il est interdit d'utiliser un détecteur sans autorisation et de prospecter sans en référer à la Commission des Cimetières britanniques, institution chargée de l'exhumation des restes de soldats.

«Nous allons faire les démarches nécessaires pour que ces soldats disparus bénéficient d'une sépulture», promet Lambis Englezos. L'historien est déjà à l'origine des fouilles qui avaient permis de retrouver 200 corps de soldats australiens de la Guerre 14-18, à Fromelles, près de Lille.

«On n'a pas le droit de chercher des corps»

Mais, aujourd'hui, l'ambassade d'Australie, concernée par la possible présence d'un nouveau charnier à Bullecourt, se montre prudente. «Lorsque les preuves suffisantes seront réunies, le gouvernement entreprendra les actions nécessaires pour retrouver les corps, comme précédemment à Fromelles. A l'heure actuelle, aucune preuve substantielle n'a été transmise», explique-t-elle. Or, impossible de recueillir des preuves sans faire, sur le terrain, des recherches qui sont interdites.

«Personne ne veut payer»

Le destin des soldats britanniques, pourtant clairement localisés, n'est pas plus clair. «Nous savons que beaucoup d'hommes du même régiment ont été tués le 15 mai 1917, en même temps que quatre militaires exhumés il y a quatre ans de ce champ, mais on ne peut pas assurer qu'ils sont exactement au même endroit», raconte une archiviste de la compagnie d'artillerie britannique qui a combattu à Bullecourt. Aucune preuve, donc aucune recherche? «Les découvertes de corps doivent être fortuites, à la suite de travaux agricoles ou de voirie, par exemple», souligne Nelly Poignonnec, des Cimetières britanniques.

«On nage en pleine hypocrisie car personne ne veut payer», glisse un passionné d'histoire locale. «On ne peut pas aller déterrer tous les soldats encore enfouis sous terre et l'expérience de Fromelles a coûté très cher», avoue un responsable, sous couvert d'anonymat. L'anneau de mémoire, inaugurée le 11 novembre, a coûté huit millions d'euros et la préfecture n'est pas en mesure de communiquer le coût de toutes les commémorations sur le sol régional en 2014.