JUSTICELa magistrature devant un cas inédit

La magistrature devant un cas inédit

JUSTICELe conseil supérieur de la magistrature va sans doute devoir se pencher pour la première fois sur une altercation entre un magistrat et des policiers...
Gilles Durand

Gilles Durand

L’affaire semble être une première dans les annales de la justice. Son altercation avec des policiers, samedi soir, risque de coûter cher au vice-président du tribunal de grande instance (TGI) d’Avesnes-sur-Helpe. Le magistrat, visiblement ivre et accompagné de ses deux enfants, avait été interpellé près de la gare de Montpellier (Hérault) et placé en cellule de dégrisement.

Selon RTL, qui a révélé l’affaire, il avait confondu un véhicule de police avec un taxi. L’homme de loi est surtout soupçonné d’avoir frappé deux policiers lors de sa garde à vue. Appelé à comparaître devant le tribunal correctionnel pour «outrage et rébellion aux forces de l’ordre», il pourrait également faire l’objet de sanctions disciplinaires, comme le prévoit l’article 43 de la loi relative au statut de la magistrature: «Tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l’honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire.»

Pas de trace d'«outrage et rébellion»

C’est la Garde des Sceaux qui doit décider de saisir ou non le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), actuellement en congé. Une enquête est alors confiée à l’Inspection générale des services judiciaires. Or depuis 1959, on ne trouve aucune trace d'«outrage et rébellion» parmi les cas traités par le CSM (voir encadré ci-dessous). «Une procédure administrative classique pour ce genre de situation a été déclenchée, signale le ministère de la Justice. La direction des services judiciaires analyse les suites à donner.»

Dans La Voix du Nord, le président du TGI d’Avesnes-sur-Helpe, Jean-Claude Czech s’avoue stupéfait. «Ces faits malheureux, qui se sont produits dans une autre juridiction, ne changent rien à la qualité professionnelle de ce magistrat, très investi au sein de la juridiction et très apprécié ici», explique-t-il.

De l’alcoolisme à la masturbation…

La dernière décision du conseil supérieur de la magistrature (CSM) concernant les magistrats du siège date du 19 décembre 2013: une juge a été déplacée d’office pour des états d’ébriété répétés au sein du tribunal. Les problèmes d’alcool font d’ailleurs partie des cas assez souvent traités. En 1999, un juge a été interdit temporairement d’exercer ses fonctions pour avoir, en état d’ébriété, menacé son épouse et son fils avec une arme à feu. Mais les exemples de dérapages ne manquent pas. Les affaires de sexe viennent aussi ternir l’image de la magistrature. En, 1994, le CSM a sanctionné un juge pour des altercations à répétition avec un justiciable, qui était le mari de sa maîtresse. En 2010, un autre a été mis à la retraite pour avoir demandé à un prévenu de «trouver un détenu susceptible de mener des représailles contre l’agresseur de sa sœur, également détenu». Un autre, en 2003, s’était vu interdire temporairement de siéger pour s’être masturbé pendant une audience. En 2007, c’est une révocation qui avait sanctionné un juge coupable d’avoir détenu des images pédopornographiques.