compte renduPourquoi la victime de l’affaire des viols de Mazan refuse le huis clos

Affaire de Mazan : Pourquoi la victime d’au moins 51 viols refuse-t-elle le huis clos ?

compte renduLa cour criminelle du Vaucluse juge, depuis ce lundi, 51 hommes, tous accusés de viols sur une même victime dans une affaire de soumission chimique
Cinquante-et-un homme comparaissent à Avignon pour les viols de la femme de l'un d'eux dans l'affaire dite des viols de Mazan.
Cinquante-et-un homme comparaissent à Avignon pour les viols de la femme de l'un d'eux dans l'affaire dite des viols de Mazan. - B. Peyrucq / AFP
Alexandre Vella

Alexandre Vella

L'essentiel

  • Ce lundi s’est ouvert à Avignon le procès hors norme de l’affaire dite des viols de Mazan.
  • Cinquante-et-un hommes sont accusés de viols sur une seule et même femme, que l’ex-mari droguait avant de la « livrer » à ses complices pour des sévices sexuels filmés.
  • Ce lundi, la partie civile a soutenu la publicité des débats, refusant les demandes de huis clos venus tant du tribunal, que du ministère public ou de plusieurs avocats de la défense.

A la cour criminelle d’Avignon,

« Ne pas rester seule avec ses agresseurs pendant quatre mois. » En quelques mots, Stéphane Babonneau, l’un des avocats de Gisèle Pélicot, dont le mari l’a droguée et laissée, inconsciente, être violée par des dizaines d’autres hommes recrutés sur Internet, a battu en brèche les arguments du ministère public, du président de la cour et de plusieurs avocats de la défense qui réclamaient tous un huis clos dans ce procès, à la cour d’assises du Vaucluse, à Avignon, qui s’annonce sordide au possible.

« Ma cliente souhaite une publicité complète, totale, jusqu’au bout », a-t-il soutenu avant que la cour ne se retire délibérer sur ces demandes de huis clos réclamé notamment au nom de la dignité des accusés comme de la victime ou encore pour éviter des troubles à l’ordre public et des atteintes aux mœurs, comme le prévoit le Code de procédure pénal. Car dans ce dossier, viendra inévitablement le moment où seront projetées les vidéos que prenait son mari pendant que ses « recrues » infligeaient leurs sévices à la victime, a averti l’avocat général.

Une victime qui est entrée dans la salle d’audience entourée de ses trois enfants, également partie civile, montrant une famille faire bloc, prête au grand déballage médiatique de la monstruosité du « paternel ». La tête haute, en robe verte, ses cheveux roux coupés au carré et ses yeux, un temps, dissimulé sous des lunettes de soleil, Gisèle, 72 ans, a fait face à son ex-mari - hasard des calendriers judiciaires, son divorce a été prononcé ce jour - soutenant un regard qu’elle n’avait pas croisé depuis quatre ans et l’incarcération de son tortionnaire.

Happening féministe en soutien à la victime

Dans le box des accusés, Dominique Pélicot, cheveux gris et tee-shirt noir, ne s’est pas dérobé et a semblé même avoir la sérénité de celui qui assume. « Mon adresse, vous la connaissez, c’est la prison », a-t-il lancé à la cour lors de la déclinaison de son identité. Cinquante autres co-accusés en ont fait de même à la suite, dans une première journée d’audience consacrée à ces formalités.

Une première journée qui a été marquée par la mobilisation de collectifs féministes à 8h30. « Qui ne dit mot, ne consent pas », a-t-il été collé dans la nuit sur un mur faisant face au tribunal d’Avignon. Ce lundi matin, une quinzaine de femmes se sont réunies devant le parvis du palais de justice, scandant : « Violeurs, on vous voit, victimes, on vous croit. »

Un « accueil » qu’a pu voir la quarantaine d’avocats intervenant dans cette affaire hors norme, ainsi que les 31 des 51 accusés qui comparaissent libres et la centaine de journalistes dépêchés pour couvrir ce procès emblématique des soumissions chimiques.

Une ambiance particulière voire légère

C’est donc dans l’agitation d’un palais de justice, dont la salle d’audience a vu la construction d’un box supplémentaire pour accueillir l’ensemble des accusés détenus, et peuplé d’avocats, de caméras, de micros et de cahiers de journalistes que s’est ouvert ce procès prévu pour durer jusqu’au 13 décembre. Et malgré l’ignominie des faits, l’ambiance n’y était pas lourde en ce premier jour et une certaine excitation semblait même traverser la salle des pas perdus à chaque suspension de séance.

Mais avec encore quatre mois d’audience et alors que le fond du dossier n’a pas encore été attaqué, toute la pesanteur de la perversité de Dominique Pélicot et de ses complices aura bien le temps de venir couvrir d’une chappe d’horreur l’apparente légèreté de ce premier jour d’un procès, qui tant par la nature des faits que par le nombre d’accusés, devrait entrer dans l’histoire.