Béziers : Le couvre-feu pour les moins de 13 ans est légitime pour la justice
Mineurs•La Ligue des droits de l’homme, qui avait saisi la justice, estimait que cet arrêté est une atteinte à la libertéJ.D. avec AFP
L'essentiel
- Robert Ménard a pris un arrêté le 22 avril afin d’interdire la circulation des mineurs de moins de 13 ans non accompagnés, entre 23 heures et 6 heures. Il l’a justifié par le « nombre croissant de jeunes mineurs livrés à eux-mêmes en pleine nuit ».
- Pour la Ligue des droits de l’homme, qui a saisi la justice, « aucun élément » ne justifie leur implication dans des troubles à l’ordre public.
- Ce mercredi, le tribunal administratif a rejeté la demande de la Ligue qui souhaitait que cet arrêté soit suspendu.
Le tribunal administratif de Montpellier a rejeté mercredi la demande de la Ligue des droits de l’Homme de suspendre le couvre-feu pour les mineurs de moins 13 ans instauré à Béziers, en raison de « l’existence de risques de troubles à l’ordre public ».
L’association estimait que la mairie n’apportait « aucun élément » justifiant leur implication dans des troubles à l’ordre public.
Le maire de la sous-préfecture de l’Hérault, Robert Ménard (DVD) a pris cet arrêté le 22 avril. Il interdit la circulation entre 23 heures et 6 heures des mineurs de moins de 13 ans non accompagnés. Il l’a justifié par le « nombre croissant de jeunes mineurs livrés à eux-mêmes en pleine nuit » et une « aggravation du nombre de faits » délictuels. Il avait notamment cité l’incendie d’une école il y a près de cinq ans, en 2019, et les « émeutes de juillet 2023 ».
« Atteinte à la liberté d’aller et venir », pour la LDH
« Mais aucun mineur de moins de 13 ans n’était impliqué dans cet incendie, ni dans les émeutes », a affirmé Sophie Mazas, avocate pour la LDH, lors de l’audience en référé suspension. Elle estime que « cet arrêté est une atteinte à la liberté d’aller et venir pour ces enfants des trois quartiers prioritaires de la ville ».
« Le maire demande aux mineurs de moins de 13 ans d’être accompagnés d’une personne majeure s’ils sortent de nuit. Ça n’a rien à voir avec une mesure d’assignation à résidence ni une atteinte à leur liberté », a répliqué Alexandre Bellotti, avocat représentant la mairie de Béziers. « Le maire a décidé de se substituer aux absents, aux parents défaillants. Il ne se substitue pas à la justice mais veut intervenir dans les angles morts dans le but de garantir la sécurité et la tranquillité publiques ».
Un arrêté similaire en 2014, annulé en 2018
Le procureur de Béziers Raphaël Balland avait évoqué en avril « une augmentation sensible du nombre de mineurs déférés devant le juge des enfants ». Ils étaient « 84 déférés en 2023 au lieu de 53 en 2022 », sans préciser s’ils avaient plus ou moins de 13 ans. En France, ils n’ont représenté que 2 % des mis en cause dans les atteintes aux personnes en 2023, selon le ministère de l’Intérieur.
S’agissant d’une procédure d’urgence en référé suspension, le délibéré est attendu dans les prochaines heures. Un arrêté similaire pris en 2014 avait été annulé par le Conseil d’Etat en 2018. « Voyons, si maintenant cela se passera de la même façon. Comment les gens le comprendraient-ils avec toutes ces violences que nous voyons ? », s’est interrogé Robert Ménard lors de la signature de cet arrêté.